i know i'll be alright, but i'm not tonight
@Noah Scott

Il se sent à l’étroit, malgré la taille de la cellule. Les barreaux n’évoquent que des mauvais souvenirs et l’odeur laisse à désirer. Le mur est froid, dans son dos, et sa tête cogne contre sa surface crasseuse. Il ferme les yeux, Miles, et cherche l’erreur. Le fameux virage, ce moment où la soirée a pris un tournant. Tout avait pourtant si bien commencé, auprès d’elle. Raeve. Un mirage, fragment de son passé venu le tourmenter dans un présent des plus paisibles. Mais ce serait mentir que de ne pas partager les torts car ce soir, c’est lui qui a fait le premier pas. Un peu chancelant. Surtout poussé par le fond d’une bouteille. Il l’a retrouvée, et ils ont parlé, et c’était presque parfait. Presque réel. Mais le retour a la réalité a été brutal, quand elle l’a déposé devant chez lui – qu’elle l’a poussée en dehors de la voiture. Il est resté figé quelques longues minutes sous un lampadaire, Miles. Incrédule, partagé entre les derniers événements et la suite à donner à cette soirée. Il aurait dû rentrer sans réfléchir davantage. Pousser la porte de l’appartement et s’échouer lamentablement sur son canapé. Puis s’endormir, noyé dans une marée de souvenirs.
Il n’en a rien fait. Au lieu de ça, il a décidé de continuer à errer dans les rues. Loin de cet appartement qui a un jour été le leur. Loin de tout ce qui aurait pu le raccrocher à elle. Les mains dans les poches et le cœur au fond du gouffre. Il s’est aventuré dans les rues de Brisbane avant de croiser la route d’une patrouille. L’échange a été cordial, mais pas assez apparemment, puisqu’il se retrouve là. Cellule de dégrisement. Il n’en est pas à son premier rodéo, mais se retrouver ici n’a toujours rien d’agréable. Il a l’impression que les murs se resserrent et que la condamnation reste à prononcer. Ses deux années en prison n’ont pourtant pas été des plus terribles ; il a fait son bout de chemin sans se faire remarquer et tout s’est plutôt bien passé. Mais il n’oublie rien de la privation de liberté et de ce qu’elle fait à un homme. Deux ans à lire, encore et encore, à apprendre les échecs, à s’occuper autant que possible, pour oublier le monde extérieur. Sa gorge se serre à ce simple souvenir et il revient à l’instant présent.
L’alcool semble s’être dissipé dans son système, ou bien est-ce le fait de terminer ici qui l’a fait décuver plus rapidement que d’ordinaire. Il se trouve stupide, mais il est trop tard pour s’apitoyer sur son sort. Il entend vaguement de l’agitation à l’entrée du poste, et quelques minutes plus tard, c’est la silhouette de Noah qui se dessine à l’entrée des geôles. Miles se redresse sur ses pieds et s’approche de la porte de la cellule. Le regard qu’il lui adresse est plein de honte, et de tant d’autres choses indescriptibles. Il s’en veut – il s’en veut tellement. « Je suis tellement désolé Noah... » D’avoir appelé à une heure si tardive. De ne savoir que compter que sur lui quand le monde s’écroule. Désolé d’être un ami si pitoyable. « Je ne savais pas qui appeler... » Et maintenant il regrette. Il se dit qu’il aurait peut-être dû s’abstenir et accepter de passer le reste de la nuit ici, tout simplement. Un policier s’approche pour ouvrir la porte et Croft retrouve enfin un semblant de liberté. Il fait profil bas quand ils quittent le poste et ne s’autorise à prendre une grande bouffée d’air qu’une fois à l’extérieur. « Merci d’être venu. » Là où d’autres l’auraient laissé moisir un peu plus encore derrière les barreaux.