Noël. Un mot que tu ne cesses d’entendre, en même temps c’est bientôt, un peu trop près à ton goût. Tu te rassures en te disant que ce n’est qu’une fois par an et encore heureux. Il ne manquerait plus que ça soit plusieurs fois dans l’année. Est-ce que tu es le Grinch ? Un peu, voir beaucoup. Tu n’as rien contre les fêtes, tu les détestes juste et ça depuis ton enfance. Sûrement un traumatisme enfoui, mais pas le temps pour ça. Toute façon, tu n’es pas stupide, tu ferais le bonheur d’un psychologue, ta personnalité est intéressante. Assez pour que les médias dressent un profil en ton nom. Narcissique est ce qui ressort le plus et alors ? Tu sais ce que tu vaux et surtout ce que tu veux, tu t’aimes et tu ne vois pas le mal là-dessous. Si tout le monde s’aimait, le monde irait bien mieux, c’est ce que tu ne cesses de dire, mais apparemment ce n’est pas comme ça que la politique fonctionne. Qu’est-ce que tu en sais ? Rien. Ce n’est pas ton domaine, tu laisses cela au spécialiste. Grognant en entendant une nouvelle chanson de noël à la radio, tu zappes, tant pis pour les news hebdomadaires. Tu pourrais faire comme tout le monde, regarder le journal à la télé, oui tu pourrais, mais clairement : tu n’es pas tout le monde. Puis tu détestes entendre des mauvaises nouvelles, tu te contentes des brèves news, ça te suffit. Et puis avec un peu de chance, tu échappes aux critiques. Ou pire encore : aux reportages de noël, tu grimaces rien qu’en songeant à la bûche de noël. Parce qu’il paraît que c’est un super sujet, ça ou bien raconter l’épiphanie. Qui se soucie de l’histoire de l’enfant Jesus ? Pas toi. Bon ce n’est pas tout, mais tu dois t’activer pour te rendre à ton point de rendez-vous ou bientôt on sera l’heure du réveillon et tu auras encore rien compris au monde. Tout va parfois beaucoup trop vite à ton goût, mais il paraît que c’est ça la vie. Dernier coup d’œil dans le miroir, « au top, comme toujours, » que tu lances à toi-même. Un peu de compliment ne fait jamais de mal. Et puis tu dois faire bonne impression, tu vas montrer ta splendeur aux gens. Ils ont besoin de voir ce qu’est un véritable acteur, de côtoyer une célébrité. Ta bonté te perdra ou plutôt Carter aura un jour ta peau. Ce dernier a eu la bonne idée de te faire une bonne action en cette fin d’année. Il paraît que c’est bon pour ton image, foutaise, elle est parfaite ton image. Tout ça pour dire que tu dois aller voir les nécessiteux aujourd’hui ou un truc du genre. La vérité ? Tu n’as pas vraiment écouté ce qu’il t’a dit, il t’a tellement baratiné sur ton image, sur le bien de cette opération.  Normal que tu décroches à un moment, si on ne parle plus de toi, le train déraille, toujours. Bon aujourd’hui, tu avoues qu’un autre sujet te passionne : Daisy. Seulement celui-là, tu ne l’abordes pas avec tout le monde et eux ne sont pas censés être au courant. Personne hormis ton entourage proche sait la vérité. Regardant l’adresse, tu l’indiques dans ton gps et en route. Tu ne t’es pas trop mis sur ton trente et un, le but n’est pas de les éblouir, mais les instruire. Ce que tu sens ne va pas être une chose facile. Il aurait pu trouver mieux comme bonne action, quoique tu préfères ça à la soupe pour les pauvres. Tu regardes la ville décorée, les lumières qui défilent sous tes yeux. Un peu trop flashy à ton goût. Parfois les gens sont too much, tu ne comprends pas ça, pourquoi faire un concours de celui qui aura la plus belle décoration. Ils pensent à la facture d’électricité après ? Et puis bon, c’est trop, non tu n’aimes vraiment pas les fêtes. Absolument pas. L’ambiance ce n’est pas fait pour toi. Tu enfiles avec plaisir le costume du Grinch et s’il faut détruire noël, tu acceptes avec plaisir la mission. Tu finis par te garer et une grimace apparaît sur ton visage, tes lunettes de soleil que tu baisses. « ew. » petit bruit qui s’échappe de tes lèvres. C’est donc ici que tu vas passer le restant de ta journée ? Pourquoi. Pourquoi le monde s’acharne contre toi. Tu gardes tes lunettes, signe de supériorité, casque toujours sur ta tête. Tu n’as pas envie qu’on te reconnaisse, même si dans le fond c’est le but. Tu sais que l’autre sera là pour prendre des photos, tu ne sais juste pas à quelle heure, elle doit venir. Un truc en toute discrétion, mais bien sûr, en tout cas tu restes merveilleux c’est ce qui compte. « Bonjour, non pas d’autographe, je suis là pour voir... » tu cherches le prénom, mince voilà que tu as oublié celle que tu es censé rencontrer. Tu ne perds pas ton charme pour autant, «  Mrs Almeta.. » tu doutes toujours sur le nom. Au pire, la personne te reprendra, tu es habitué à ça et tu sais toujours t’en sortir. Enlevant tes lunettes, tu entends encore un son qui te fait serrer les dents. Oh que tu détestes Noël.

Est-ce que tu as envie d’être là ?
Bien sûr que non.
Qui pourrait avoir envie d’être dans cet endroit ? Décrépi de partout, non cet endroit ne fait pas rêver. Tu te demandes franchement qui peut prendre plaisir à venir ici tous les jours. Pas toi, rien qu’une heure va te sembler long. Sauf que tu n’as pas le choix, d’après Connor, c’est une très bonne idée pour ton image. Parfois tu as l’impression qu’à l’écouter ton image est en berne. Tout le monde t’adore, alors où est le problème ? En quoi venir voir des gamins dans un centre va l’embellir un peu plus ? C’est ce que tu lui as demandé, mais il a soutenu que c’était mieux auprès des directeurs de théâtre. Tu dois conserver cette image du mec charmant, la main sur le cœur. Bullshit quand on te connaît vraiment, tu n’es pas ce personnage. Tu en es parfaitement conscient. Tu sais que tu joues un rôle au quotidien, et alors ? Tu es doué, tu es beau, tu ne vois pas où est le mal. Tu ne fais qu’énoncer une vérité qui saute aux yeux. Pourtant y a une autre facette de toi, que Connor et tes proches connaissent. Il ne cesse de te dire que tu devrais être un peu plus comme ça tous les jours. Et puis quoi encore ? Tu n’as guère envie de te faire manger tout crue. Tu connais ce monde, celui du show-business. Tu sais ce qu’il en coûte d’être trop gentil. Tu sais qu’il ne faut pas croire tout ce qu’un directeur, scénariste va te promettre. Ceux qui veulent avant tout : l’argent. Tu l’as appris au fil des années. Tu es rôdé à présent, alors peut-être que les rôles se bousculent moins, surtout au niveau du théâtre. Et ça. Ça te déprime un peu, mais tu ne le montres pas. Tu n’es pas de ce genre-là, oui tu as un ego un poil surdimensionné. D’après Syed ton ego est digne des muscles de Vin Diesel ou The Rock et alors ? Tu t’es armé avec le temps et tu n’as pas envie que cela change. C’est donc un peu dépité que tu rentres dans cet endroit, triste à souhait, priant le seigneur, s’il existe vraiment pour qu’il te sorte de là rapidement. Tout devrait être rapide normalement, les gamins vont être impressionnés – normal – tu vas parler un peu du monde dans lequel tu gravites. Ils auront des paillettes plein les yeux et ta mission sera un succès.

Pour le moment, ton regard se pose sur cette fan qui ose te déranger pour un autographe. Tu n’as pas que cela à faire. Oui, tu peux être aussi un acteur con, mais tu ne le caches pas. C’est peut-être pour ça qu’il veut arranger ton image. Peut-être. Toujours est-il que tu retires tes lunettes, tu la jauges un instant. Écoutant vaguement ses mots. Tes neurones cogitent rapidement. Deux options s’offrent à toi. Soit tu fais semblant, tu joues le jeu, elle sera heureuse. Ou bien tu lui dis la vérité : tu n’as aucun souvenir d’elle et là bien sûr, elle sera une âme en peine. Ce que tu peux comprendre, c’est dur d’être refoulé par un acteur tel que toi. Quoi dire ? Tu réfléchis un instant. « Iris bien sûr ! Excuse-moi sur le coup je n'ai pas percuté. Comment vas-tu ? » tu joues la comédie, parce que tu es doué pour ça. Tu n’as pas envie de blesser son petit cœur de fan. Parce qu’après tout, c’est grâce à tes fans, que tu peux vivre aisément. Tu lui adresses ton plus beau sourire, tu sens que tout cela prend. Elle te parle des gamins, dont tu n’en as rien à carré, mais tu ne laisses rien présager. Ce n’est pas le moment, tu dois faire bonne figure. « eh bien ne les faisons pas trop attendre. J’ai cru comprendre que je devais leur expliquer l’envers du décor ? Y a des passionnés dedans ou bien ils sont.. » paumé comme cet endroit ? Non, tu ne peux pas dire ça. « encore en recherche ? » oui, ça c’est mieux, quand tu dis que tu connais ce monde. Tu joues un rôle au quotidien et tu es plutôt bon dans ce rôle. Tu pourrais te sentir mal, mais dans le fond : absolument pas.