@Megan Saunders & @Mairead O'Riordan
Combien de fois y a-t-elle pensé ? Un animal de compagnie. N’est pas littéralement de la folie ? Avec les horaires qu’elle fait, elle a bien conscience qu’elle n’a pas de temps à consacrer à une petite bête à poils. À son grand désarroi. Parce que lorsqu’elle rentre chez elle, il s’avère qu’elle est seule, personne pour lui tenir compagnie. L’appartement est grand et vide et il semblerait que maintenant elle ait la certitude que rien ne viendra combler ce vide. Elle a passé l’âge de pouvoir tomber enceinte par accident, c’est une possibilité qu’elle a oublié depuis quelques temps et c’est sans doute pour cela qu’elle enfouit ses pensées dans le travail. C’est plus sûr. La vie lui a fait comprendre qu’elle ne sera pas mère, jamais. Sinon pourquoi lui avoir fait perdre son bébé alors que la grossesse étant tant avancée ? Une injustice dont elle ne s’est toujours pas remise et qu’elle ne pense pas mériter. C’est peut-être parce que la cicatrice est toujours à vif qu’elle n’avance pas comme elle le devrait. Il est possible qu’elle aurait dû véritablement aller de l’avant… pas juste faire semblant et faire pénitence en s’engageant dans l’armée.

Son regard se perd sur les cages dans lesquelles se trouvent les chiens. Un petit sourire sur les lèvres, elle aurait envie de tous les prendre. Peut-être devrait-elle songer à une reconversion, ouvrir une pension pour chien, un refuge… tous les adopter pour les choyer. Les animaux sont loyaux… les chiens surtout, ils ne partent pas. Son cœur bondit dans sa poitrine lorsqu’elle voit un petit croisé pas très grand, les oreilles droites, une couleur fauve avec un petit air de renard. Il est assis devant sa grille, la queue remuante, il attend sagement d’être choisi. Est-ce une bonne idée ? Un geste de la main, un sourire vers le bénévole du refuge pour demander d’ouvrir. Il s’exécute. « - Vinnie a été placé après le décès de son maître, on a identifié qu’il devait être croisé petit berger et peut-être pinscher sans trop de certitude, c’est un ange, il est là depuis un mois un peu prêt. » La cage s’ouvre, les jambes de Mairead faiblissent pour s’accroupir et le chien avance doucement, sa truffe la renifle de partout, elle en rit et puis les deux pattes montent sur elle. L’impression d’être l’élue s’immisce en elle, l’envie de le garder aussi. Elle se redresse avec le chien dans les bras qui a posé sa tête sur son épaule. « - C’est ce qu’on appelle être choisie… » Lui lance le bénévole sur le ton de la plaisanterie. « - J’ai tellement peur de ne pas être à la hauteur » Se confit-elle. Parce que c’est la simple vérité. « - Promenez-vous avec lui un peu, on n’est pas pressé »

Le chien est attaché avec une laisse, il ne lâche pas sa future maîtresse du regard. Mairead avance alors dans le refuge, se promène un peu, et c’est durant cette balade s’acclimatement qu’une tête blonde attire son attention… encore. « - Décidemment, je vais finir par croire que vous me suivez… » Lance-t-elle un peu blagueuse. La tête blonde… c’est bel et bien Megan. Vinnie s’approche pour lui faire la fête, comme s’il la connaissait, comme si elle était choisie elle-aussi.

@Mairead O'Riordan & @Megan Saunders


Durant tout le trajet en voiture, Megan ne réfléchit pas à son plan. Le CD de Pink s'enchaine et fait vibrer l'intérieur de l'habitacle, tandis que sa voix se mêle à celle de sa chanteuse favorite. Megan s'amuse comme une folle et s'autorise même à danser à chaque feu rouge. Ce n'est qu'une fois garée sur le parking du refuge, et la chanson So What terminée, que Megan coupe le moteur. Le silence prend désormais possession de sa Jeep, forçant la blonde à réfléchir à sa stratégie. Si elle est venue jusqu'ici, ce n'est pas pour elle. Megan a beau être passionnée et amoureuse des chiens, elle s'est toujours interdite d'en adopter un. Son train de vie et son instabilité ne l'ont jamais permis. Rares sont les fois où elle passe des journées entières à la maison. Megan est toujours en train de courir à droite, à gauche. Et quand elle reste chez elle, c'est pour glander au lit ou jouer durant des heures aux jeux vidéos. Elle ne doit donc pas oublier qu'avoir un chien est incompatible avec sa vie. Sortant de sa Jeep Wrangler jaune, Megan se répète en boucle ces quelques mots : tu n'es pas ici pour toi.

Le but de sa venue est de trouver un nouveau chien à Yaël. Oliver étant resté auprès de Daphne, et Jude étant présent qu'une semaine sur deux chez sa sœur, Megan doit combler le vide de leur absence. Elle sait qu'il sera difficile pour Yaël de remplacer Oliver, son chien. Mais peut-être que ce plan marchera ? Peut-être que sa frangine retrouvera le sourire grâce à une frimousse d'amour. Sûre d'elle, Megan franchit les portes du refuge en souriant. Les aboiements qu'elle entend lui brise le coeur et chasse toute la joie qu'elle ressentait. Sa bonne humeur se dissipe, alors qu'elle entend les appels à l'aide de ces boules de poils. Ils n'attendent que de l'amour ; et une nouvelle famille. Peut-être elle ? Cette pensée lui traverse l'esprit et la fait immédiatement paniquer. Par chance, un homme vient se présenter.

– Je ne suis pas là pour moi, balance-t-elle précipitamment au bénévole qui la regarde soudainement bizarre.

La réponse qu'il lui offre est déplaisante. Un animal n'est pas un cadeau et bla-bla-bla. Il ne la laissera pas adopter sans la présence du véritable maitre et bla-bla-bla. Elle est complètement inconsciente de penser qu'un chien peut être comparé à un objet et bla-bla-bla. Elle ne comprend pas d'où viennent ces remontrances. A-t-elle seulement sous-entendu qu'elle comparait un chien à un vulgaire vase en céramique ?! Ses sourcils se froncent tandis que le bénévole continue son speech en carton. Megan, ça la gonfle, et vite. Elle ne supporte pas qu'on déforme ses propos. Ce type ne sait rien d'elle, rien de sa passion pour les canidés, rien du malheur de sa sœur. Alors qu'il ferme sa gueule et vite !

Ses ongles se plantent dans la chair de ses paumes. Megan se retient de lui envoyer son poing dans la tronche. La retenue ça n'a jamais été son truc. Elle, elle est plutôt du genre à foncer tête baissée et à se défendre par la violence. Mais pas aujourd'hui. La Saunders souffle un bon coup et essaye de garder la tête haute. Ce connard ne va certainement pas lui plomber sa journée !

– Okay okay ! Je vais au moins regarder les toutous histoire de ne pas être venue pour rien, s'agace la blonde. Ce qu'elle ne précise pas, c'est qu'elle fera des photos d'eux, qu'elle ira ensuite montrer à Yaël pour la convaincre d'en adopter un.

Malgré sa réticence, le bénévole hoche la tête et lui pointe du doigt le chemin à prendre pour se rendre aux box. Megan hoche la tête en guise de réponse et passe rapidement la porte que lui a montré le bénévole. Celle-ci donne sur un immense jardin, donnant lui même l'accès à plusieurs maisonnées dans lesquels les animaux doivent être classés par espèce ? Megan a déjà oublié ce qu'il lui a dit. Elle devait aller où déjà ? La maison de gauche ou celle de droite ? La Saunders se pince l'arrête du nez en réfléchissant et ferme les yeux, tandis qu'une voix dans son dos l'extirpe hors de ses pensées. Cette voix, elle la reconnaîtrait entre milles. Elle fait manquer un battement à son cœur et la fait se retourner précipitamment. Mairead. Sa moue mécontente laisse place à un sourire involontaire. Avec le rayon de soleil qui se reflète dans ses cheveux, Mairead a tout l'air d'un ange. Elle est magnifique.

– J'ai mis un traceur gps sous votre voiture, répond-elle dans la foulée d'un ton taquin, alors que son regard quitte enfin les yeux de son ex fiancée pour regarder plus bas.

La boule de poils que Mairead tient en laisse tire pour s'approcher d'elle. Megan fond d'amour pour ce chien qui a l'air de la connaitre depuis toujours. Sa queue s'agite dans tous les sens et il essaye de la lécher ses jambes pour lui faire des bisous. Rapidement, Megan oublie qui se trouve à l'autre bout de la laisse et s'accroupit face au poilu. Il s'allonge sur le dos tandis que la Saunders gratouille son ventre comme une dingue.

– Ouuuuh ça c'est mon chien ça, ah oui oui, mon toutou d'amour ça ! Olalaaaaa ça gratte ! Hein ? lui parle-t-elle d'une voix un peu gaga alors que lui continue d'agiter sa queue et d'accepter les caresses que l'inconnue lui offre. Tu t'appelles comment toi ? lui demande-t-elle alors qu'il se redresse d'un coup et qu'il part quémander des câlins cette fois-ci plus à Megan mais à Mairead.

Son geste rappelle à Megan qui se trouve en face d'elle et la fait se relever immédiatement. Elle se racle la gorge alors que son regard se pose à nouveau dans celui de son ex.

– Hum désolée, c'est votre chien ? Il m'aime bien, j'crois ?

@Megan Saunders & @Mairead O'Riordan


Il est vrai qu’un chien c’est une sacrée responsabilité. Est-ce une bonne idée ? Mairead tente de se persuader qu’elle ne craquera pas, seulement c’était sans compter Vinnie. Ce chien frappe son cœur en plein cœur et elle n’a pas envie de le laisser dans cette cage au milieu de la centaine de chiens que comptent le refuge.  Le bénévole saute sur l’occasion pour offrir un promenade à l’urgentiste et le petit chien et il est vrai que le feeling est là, qu’elle a le sourire aux lèvres Mairead. Son cœur vacille littéralement. Elle a envie mais voilà sa raison la rattrape, il va falloir qu’elle adapte ses horaires pour pouvoir s’offrir des pauses à l’appartement pour le sortir. Il sera toujours mieux dans son appartement, cela dit que dans ce refuge, non ? C’est ce qu’elle a envie de croire. Et puis il rendra les lieux un peu vivant. Il y a toujours un pincement au cœur lorsque la docteure passe le pas de la porte et que personne ne l’attend. Ce n’est pas une situation facile et enviable, elle n’en parle pas souvent mais il est vrai qu’elle peine à trouver sa place, parfois, elle songe à rentrer au pays, l’Irlande pourrait l’accueillir autant que l’Australie, pourquoi avoir mis autant de distance entre elle et sa famille ? Parfois, elle se demande. Elle en vient à regretter de ne pas avoir de liens particuliers avec son frère ? Peut-être un peu. Mais le feeling n’est jamais réellement passé encore eux.

La promenade se fait, Mairead réfléchit un peu trop, ses yeux bleus rivés sur la petite bête qui régit sa direction, jusqu’à ce qu’il trouve une personne à qui faire la fête. Pas n’importe qui. C’est fou ? Le destin ? Quoi ? Vraiment ? Mai est du genre cartésienne alors c’est compliqué à entendre. Pourtant... c’est bien Megan qui se trouve à nouveau sur son chemin. C’est la médecin qui prend la parole en première, laissant un petit sourire s’installer sur son visage, elle plaisante évidemment, elle n’imagine pas une telle chose et Megan semble tout aussi surprise. La réponse de la blonde l’amuse, c’est vrai. Il petit rire s’échappe d’entre ses lippes. « - Je comprends mieux ! » Elle s’approche doucement, Vinnie semble avoir adopté Megan. C’est fou, il l’aime bien et elle lui rend bien, la scène est douce et amusante, et voilà que Mairead sourit presque bêtement en regardant cette scène. « - Non... enfin je ne sais pas, j’avoue que je craque bien pour ce petit cœur mais j’ai peur de ne pas être à la hauteur... » Un haussement d’épaules. « - Il s’appelle Vinnie, vous venez pour adopter un petit animal vous aussi ? » Elle se penche pour caresser Vinnie elle-aussi. « - Je suis étonnée que vous ne vous soyez pas tournés vers un cheval, j’avais cru comprendre que le courant était bien passé » Elle mordille sa lèvre inférieure, son regard est rieur. Elle la taquine, évidemment. « - J’espère que Yaël va bien par ailleurs » Un petit sourire, plus sérieux cette fois-ci. Est-ce une bonne idée de lancer le sujet de son ex-belle-sœur, elle ne sait pas mais c’est sincère. Elle espère qu’elle va mieux.

@Mairead O'Riordan & @Megan Saunders


Revoir Mairead c'est toujours compliqué. Parce qu'à chaque fois qu'elle est face à elle, Megan ressent l'envie de lui hurler ses quatre vérités au visage. Mais le pire là-dedans, c'est que dès que leurs regards se croisent, la colère s'échappe pour laisser place à tout autre chose... Un sentiment, une sensation, sur lesquels Megan n'a aucune emprise, aucun contrôle. Son cœur s'accélère dès que Mairead lui sourit et sa bouche devient plus pâteuse lorsque leurs iris s'accrochent pour ne plus se détacher. Comme si son corps retrouvait sa place en cette compagnie qui lui a tant manqué. Après tout, Mairead elle a été son grand amour. Celui avec un grand A ; celui qu'on n'oublie pas. Après plus d'une décennie de couple, Megan ne peut décidément pas oublier, ni tirer un trait définitif sur cette histoire qui l'a pourtant tant fait souffrir. Son corps, lui, ne demande qu'à retrouver cela. Comme s'il était aimanté et lié pour l'éternité à celui de Mairead. Le destin lui-même essaye de les réunir à nouveau, puisqu'elles finissent constamment par recroiser la route de l'autre. Ça l'interroge Megan et elle se demande si ce n'est pas un signe. Tout du moins, à chaque fois que cette question commence à se former dans ses pensées, la Saunders fait finalement son possible pour l'effacer. Parce que l'amour c'est une grosse connerie. Elle l'a bien compris par le passé ; lorsque sa famille a dû la ramasser à la petite cuillère suite au départ virulent de Mairead.  Elle a trop souffert Megan. Tellement qu'elle est incapable d'affronter ses sentiments ; incapable de reconnaître que Mairead l'attire encore comme nul autre. Et dès qu'elle se fait remarquer à elle-même que son ex est sexy, Megan le regrette immédiatement. Elle se sent conne et débile. Elle préfère donc passer outre, comme à cet instant, alors que le sourire de Mairead fait s'arrêter son cœur. Sa poitrine la serre, tellement que Megan est obligée de plaquer sa main sur son torse tant ça lui fait mal. Il lui faut plusieurs secondes pour reprendre le contrôle, mais surtout l'aide de Vinnie. Le chien la sauve. Megan le caresse sans s'arrêter, et lui offre toute son attention. Pourtant, d'une oreille, Megan écoute ce que son ex lui dit. Bien décidée à lui répondre, elle relève le visage dans sa direction tout en restant accroupie par terre à gratouiller le chien. C'est à ce moment-là que Mairead choisit de se rapprocher. Pire. De s'accroupir à son tour pour caresser le chien. Leurs mains se frôlent avant d'entrer en contact. Le geste est surprenant et fait immédiatement se reculer Megan.

Son fessier entre en contact du sol alors qu'elle est complètement obnubilée par la présence de son ex face à elle. C'est trop tard, Megan n'arrive plus à contrôler ses pensées. Putain ce qu'elle est canon ! Et ce qu'elle s'en veut à elle-même d'agir comme la plus fragile du monde. C'est quoi ce délire ?! Depuis quand est-elle aussi frêle, aussi vulnérable ? L'effet Mairead en est la cause.

– En tout honnêteté, je pense que vous seriez à la hauteur plus que n'importe qui. Puis Vinnie a l'air si gentil, souffle-t-elle sans réfléchir, aux précédents propos de Mairead. Elle ne réalise pas le sous-entendu, et donc qu'elle laisse entendre la connaître.

Il faut que dire que son ex-fiancée, Megan la connait mieux que quiconque. Elle sait la mère merveilleuse qu'elle aurait pu être ; et se doute donc qu'elle ferait une parfaite maîtresse pour Vinnie. En plus, ce toutou semble adorable. Il a l'air d'attendre que ça ; de trouver sa famille. Que Mairead le choisisse. Passionnée de chien, Megan se dit que son ex gagnerait des points si elle était l'heureuse maîtresse de cet adorable toutou. Mais à peine pense-t-elle cela qu'elle le regrette. Elle se sent idiote, et à nouveau sous l'emprise de ce démon de son passé. De cette femme qui lui a tant brisé le cœur.

Lorsqu'elle se redresse pour revenir caresser Vinnie, en même temps que Mairead donc, Megan ne peut s'empêcher d'observer la blonde. Son visage, ses lèvres, ses yeux, ses cheveux, puis même son décolleté. Tout y passe en un temps record, avant qu'à nouveau leurs mains entrent en contact. Cette fois-ci, Megan ne se recule plus, tandis que Mairead s'autorise à parler des chevaux. Puis de Yaël... La Saunders déglutit, craignant d'être démasquée. Elle refuse de parler de sa sœur à Mairead.  

– Elle va bien, ouais. Pourquoi ? Vous l'aimez bien ? demande-t-elle bêtement pour essayer de se sauver, alors que son regard cesse d'observer Mairead pour se poser sur leurs mains.

La sienne est posée sur celle de la blonde, tandis que Vinnie pleure. Il quémande des gratouilles, encore. Mais Megan ne bouge plus. La pression légère exercée sur la main de son ex l'empêche elle aussi de bouger. Sa respiration se saccade alors qu'elle remonte son regard bleuté dans celui de la doctoresse.

– Le courant est plus passé avec toi qu'avec les chevaux, Mai', répond-elle en la tutoyant pour la première fois, complètement envoûtée par Mairead et leur proximité soudaine. L'utilisation de son surnom était également involontaire. Megan s'en veut immédiatement et a l'impression de devenir à chaque fois cette petite chose fragile dès qu'elle est en compagnie de Mairead. Vous, je veux dire. Désolée, lâche-t-elle précipitamment en lâchant la main de Mairead et en se relevant spontanément.