@Joshua Lorenzi & @Isana Montgomery

( o u t f i t ) · Il y a un an jour pour jour, Walter et Isana vivaient une vie rêvée, un conte de fée. Plus heureux que jamais, leur histoire d'amour a malheureusement pris fin dix jours plus tard. Le 16 avril 2023 a été marqué par la voix des médecins raisonnant dans la chambre d'hôpital. Heure du décès : 17h30. Ces mots, Isana les entend encore par moment. Ils font écho à ce souvenir douloureux. Il arrive même qu'ils la réveillent au beau milieu de la nuit. Parce que ce jour-là, Isana n'a pas seulement perdu son meilleur ami, mais aussi son amant, son époux. Une perte qu'elle a beaucoup de mal à accepter, malgré les douze mois qui se sont écoulés. Si sur le chemin de son deuil, Isana a remis en question ses sentiments vis-à-vis de feu Walter, la perte n'en demeure pas moins douloureuse. Parce qu'elle l'aimait Walter. Peut-être pas comme elle aurait dû l'aimer, mais elle tenait profondément à lui. Et inversement. Il l'aimait tellement, qu'il lui a presque léguer l'entièreté de sa fortune, à l'exception de son entreprise qu'il a confiée à sa fille.

Dans dix jours aura lieu la cérémonie en hommage à la mort du multimillionnaire. Si lors de sa première soirée d'hommage elle avait déjà vu grand en organisant un feu d'artifice au départ du manoir Montgomery, elle voit aujourd'hui encore plus loin. Rien n'est trop beau pour Walter. Elle voudrait lui réoffrir la vie, si elle le pouvait. Mais malheureusement, c'est bien la seule chose qu'elle ne peut pas faire Isana. Ça lui fait encore un mal de chien. Une douleur qu'elle n'exprime pas tellement. Elle n'en parle pas. À personne. Pas même à sa belle-fille avec laquelle elle s'entend bien et qui fait partie de son quotidien depuis son mariage avec Walter. Personne ne perçoit son mal-être, personne ne voit ô combien la veuve endeuillée n'a toujours pas réussi à sortir la tête hors de l'eau. Même ses propres parents ont l'impression qu'Isana s'en est remis. Peut-être parce qu'ils n'ont jamais cru au mariage de leur fille. Ils ont essayé de lui en parler une fois ; de comprendre. En retour, ils ont eu le droit à une pluie de remontrances. Isana s'est offusquée de réaliser que même ses parents, doutaient d'elle. Pour eux, il semblait évident que Walter n'était pas sa destinée. Le prénom de Valentina est rapidement apparu au milieu de la conversation, ce qui n'a fait qu'empirer l'échange au sein de cette famille pourtant si aimante d'ordinaire. Depuis ce jour, en 2019, ils n'en ont plus jamais reparlé. Ni de ce mariage auquel ils n'ont pas tellement cru, ni de Valentina – devenue le sujet le plus tabou chez les Prakash. Coup dur pour les parents d'Isana, qui ont toujours énormément apprécié les Lorenzi au complet. Relation qui a dû cesser en même temps qu'Isana et Walter ce sont passés la bague au doigt. C'est en tout cas ce qu'elle croyait, Isana. Jusqu'à aujourd'hui.

Les Prakash ont invité leur fille à déjeuner. Leur fils, Arjun, ne sera pas des leurs puisqu'il gère l'épicerie familiale. Le repas se passe sans encombre et des rires viennent même se mêler à la conversation avant de laisser place à un moment plus calme. Le silence vient plomber l'instant dès que la soirée en hommage à Walter devient le sujet principal de leur conversation. Les questions des parents meurent, sans réponse, tandis que leur fille les observe tour à tour. Ils veulent savoir ce qu'elle a prévu, si elle a besoin d'aide. Ils semblent ne pas comprendre pourquoi elle ne les a pas choisi comme traiteur. Tant mieux. Ainsi, ils ne réalisent pas le fossé qu'elle essaye d'instaurer entre eux et cet univers bourgeois. Ça ne leur ressemble pas aux Prakash. Eux, ils ne sont pas portés sur l'argent ; ils seraient perdus au milieu de la haute sphère australienne. Alors après plusieurs secondes de silence, Isana explique très brièvement qu'il y aura un lancé de colombes.

Le repas prend fin lorsque ses parents remarquent l'heure qu'il est. Ils doivent aller prendre la relève à l'épicerie. Shama panique à l'idée d'être en retard et attrape déjà les clés de leur voiture. Après une étreinte réconfortante – mais brève – partagée avec sa famille, Mahin disparait en laissant seules mère et fille.  

– Oh ma chérie, avant que tu partes tu vas devoir me rendre un service. Pourrais-tu apporter le second plat aux Lorenzi ? J'ai complètement oublié. Je leur avais promis de leur amener mon curry mais vu l'heure qu'il est, je ne vais pas pouvoir y passer. Tu sais comment ils sont... Dès que tu y es, tu y restes des heures ! explique d'un ton enjoué Shama. Le piège est lancé. Il n'y a qu'ainsi qu'elle pourra faire se rabibocher sa fille avec Valentina. D'autant que Shama pense avoir repéré la voiture de l'italienne dans la rue.
– Quoi ? No... commence à s'offusquer Isana, subitement prise de panique, avant d'être interrompue par sa mère.
– Merci ma puce ! On s'appelle ce soir ! Je t'aime, s'exclame-t-elle avant de déposer un baiser sur sa tempe.

Sans attendre de réponse, Shama rejoint son époux dans leur voiture, qui klaxonne comme un dératé. Isana comprend le message et sort en trombe de la maison familiale. Elle déplace sa nouvelle Maserati garée dans l'allée de ses parents et gênant leur vieille Chevrolet. Ses parents la saluent d'un geste de main avant de s'envoler vers l'horizon, en direction de la ville. Isana les observe disparaître alors qu'un soupire las s'échappe d'entre ses lèvres. Génial... Voilà pourquoi elle ne venait plus ici ! D'abord parce qu'elle ne supporte plus de venir dans ces lieux qui lui rappellent tant de souvenir. La maison des Prakash est voisine de celle des Lorenzi depuis des décennies. Depuis l'enfance, en réalité. C'est ainsi qu'elles se sont rencontrées Valentina et elle, et qu'elles se sont soudées comme jamais. Ensuite, parce qu'en venant chez ses parents, Isana redoute constamment d'y croiser un Lorenzi. N'importe lequel. Ils sont ceux à éviter.

Alors pourquoi diable sa mère lui fait-elle cela ?! Si Isana sait que Shama a toujours adoré Valentina, elle ne comprend pas pourquoi elle essaye de lui causer des soucis supplémentaires. N'en a-t-elle pas assez avec la soirée en hommage à Walter qui approche ?! Isana peste alors qu'elle retourne dans la demeure familiale désormais vide. La porte se claque dans son dos, tandis qu'elle regrette déjà l'absence d'Arjun. Il aurait suffi de lui faire des beaux yeux pour que son frère y aille à sa place.

Après avoir pris son courage à deux mains, la multimillionnaire quitte la petite maison de quartier, traverse la minuscule allée pour rejoindre celle qui relie la maison des indiens avec celles des italiens. Une profonde inspiration plus tard, Isana avance et sonne à la porte avec l'aide de son coude, le plat en main. Au fond d'elle, elle espère que ce soit Valentina qui lui ouvre. Les retrouvailles sont faites depuis de long mois. Elle n'aura qu'à lui tendre le plat de poulet pour partir ensuite sans se retourner. Oh oui, elle l'espère. C'est finalement presque celle qu'elle redoute le moins. Car en réalité, les Lorenzi, Isana ne les a plus revus depuis plus de dix années. Fait désolant quand on sait ce qu'ils représentaient pour elle. Un second foyer ; une seconde famille. Elle les aimait Isana. Tous autant qu'ils soient. Son cœur palpite alors que la porte s'ouvre enfin et elle ne sait pas ce qui lui prend Isana, mais elle espère tellement que ce soit Tina, qu'elle s'adresse à la personne sans avoir poser son regard sur elle.

– Salut Tina, mes pa... commence-t-elle bêtement tandis que son regard effrayé se pose dans une paire de yeux qu'elle n'a plus vue depuis des années. Des yeux qui sont tout ; sauf ceux de sa Tina.

@Joshua Lorenzi & @Isana Montgomery

Il est coutume de penser que la notion de famille est très importante en Italie et… C’est vrai. Le cliché des enfants, même adultes, qui trainent très souvent dans la maison familiale, aidant les parents dans les tâches ménagères comme s’ils n’avaient que dix ans, aussi. En tout cas, me concernant, je savais que nourrissais gracieusement ce cliché. C’est bien simple, en dehors de mon boulot et ma coloc, j’étais presque tout le temps chez mes parents… Bon, il est vrai que, avec mon emploi du temps de chirurgien, on ne me voyait déjà pas beaucoup, mais disons que mon temps libre, j’aimais le passer chez eux —et après, je m’étonne toujours d’être encore célibataire… Bref, aujourd’hui n’étais clairement pas une dérogation à cette habitude. Trois jours de repos consécutifs, j’avais même songé à retourner à Florence, mais c’était sans compter sur la mama qui avait besoin d’aide pour installer la cuisiner.

—Pourquoi payer des gens pour le faire quand j’ai un mari en vie et un fils aussi musclé que toi, hein ? affirma la matriarche quand j’osais admettre ce que je contais faire de mon voyage. Et puis, c’était sans compter qu’avec l’avion, je n’allais pas beaucoup profiter de ma terre natale, mais qu’importe… ça n’allait être que partie remise, contrairement à cette nouvelle cuisine, qui elle, n’allait pas attendre. Valentina avait bien de la chance d’éviter cela !

Nous étions au deuxième et dernier jour de travaux. Rien de bien sorcier, en vérité. La grande dame ne voulait « que » changer la peinture, le carrelage et les placards. Sur la première journée, nous avions tout ce qui touchait directement aux murs. Peinture, sous couche, carrelage et compagnie. Et ce matin, levé pour huit heures, il était temps de monter les meubles sur les murs. Rien de bien sorcier, surtout à deux. C’est que la mama avait raison, ça allait être rapide… Pour le déjeuner nous avions fini ! A six mains, la pièce avait été rangée et nettoyée en moins de temps qu’il ne faut pour le dire.

Flemmard tous les trois à l’idée de cuisiner —et ça se comprenait— on s’était mis d’accord pour manger chinois. Un truc à emporter, rien de bien sorcier ! Et c’est comme ça que, vers treize-heure vingt, mes parents quittèrent la maison pour passer à Sushi Live. Ils en avaient pour une bonne heure, si ce n’est plus, et c’était le timing idéal pour profiter de la piscine. Et j’étais d’accord avec ma mère, vu mon teint, j’avais tout intérêt à prendre un peu le soleil « ou sinon tu vas finir par ressembler aux corps dans la morgue de ton hôpital bien-aimé ! » m’a-t-elle dit avant de partir… Terrible, cette femme avait toujours raison !

Mais mon idylle avec l’astre ne fut pas bien long : quelqu’un sonnait à la porte. Je devais l’admettre, vu la puissance de cette sonnette —mon père n’ayant plus toute son audition— je maudissais de l’avoir entendu. Qu’on me laisse cuire à petit feu, non ? Je grommelais dans mon maillot de bain, je rallais tout en mettant une serviette autour de ma taille et je soupirais en me dirigeant vers la porte… Bref, peu importe qui venait de me déranger, il avait intérêt d’avoir eu une bonne raison de le faire.

Et le moins qu’on puisse dire, c’est que celle-là, je ne l’avais pas vu venir. Cette possibilité scénaristique. Pas le moins du monde. Je venais d’ouvrir la porte, et à peine avais-je reconnu le visage de cette perfide sorcière que je claquais la porte une première fois. Isana. Mais qu’est-ce qu’elle foutait là ? Et la question me poussait à ouvrir la porte aussi rapidement qu’elle fut close.

—Je peux savoir ce que tu fous ici, t’as pas d’autres mariage à détruire ou c’est comment ? disais-je en grinçant des dents.

Puis je vis le plat dans ses mains, et un rire nerveux s’échappa de mes lèvres. Je soupirais longuement, je savais très bien de qui cela venait et du coup, pourquoi, elle était là.

—Ecoute, répondais-je sans lui laisser le temps de réagir à ma première pique, aussi soit la cuisine de ta mère, ça ne va pas te faire revenir ici. T’es quand même culottée de penser ça. Que nos parents se parlent encore, c’est cool, mais compte pas sur moi. Tu nous a trahi une fois, mais pas deux. Donc dis à tes parents que s’ils veulent un truc avec mes parents, ils viennent d’eux, pas besoin d’envoyer un…

Un rictus de dégout sur le visage.

—...une traitresse dans ton genre.

A ce moment-là, j’aurais dû fermer la porte et retourner à mon bronzage méditerranéen, et pourtant… Une partie de moi était curieux de savoir ce qu’elle allait répondre de tout ça.

@Joshua Lorenzi & @Isana Montgomery

( o u t f i t ) · En frappant à la maison voisine des Prakash, Isana s'est préparée au pire des scénarios. Tomber nez-à-nez avec l'un des parents Lorenzi est un risque pour son existence. Elle le sait. Pourtant sa mère a décidé de la confronter à ces fantômes de son passé. Une stratégie, un plan visiblement monté, dont Isana n'y trouve aucun sens. Les Lorenzi ne font plus parti de son existence depuis une éternité. Les revoir consisterait à remuer le couteau dans une plaie encore béante dans sa poitrine. Mais elle n'a nul autre choix, Isana. Elle doit les affronter. Ça ira vite. Elle n'a qu'à leur tendre le plat de sa mère avant de prendre la fuite. Exactement comme elle l'a fait le jour du mariage de Valentina et Walter ; lorsque sa meilleure amie a insisté pour savoir pourquoi Isana lui interdisait de l'épouser. Une question qui est restée en suspend et qui a même fini par tomber aux oubliettes. Parce qu'Isana n'a jamais compris le sens de ses mots, n'a jamais su pourquoi elle refusait que Valentina épouse cet homme. C'était pourtant simple... Isana était éperdument amoureuse de Valentina. Un amour que les deux concernées n'ont jamais compris, même jamais remarqué. Encore aujourd'hui, lorsque Valentina lui a demandé des explications, Isana a été incapable d'en trouver la réponse. Prendre la fuite est donc la solution de facilité ; celle dont elle n'hésitera pas à se saisir et à pratiquer si les parents de Valentina s'en prennent à elle. Elle le mériterait pourtant, même si elle a toujours refusé les baisers de Walter lorsqu'il était encore marié à l'italienne.

La silhouette qui se décide devant elle n'est pas celle attendue. Ce n'est pas Valentina – avec qui les choses auraient été plus faciles maintenant qu'elles se sont revues plusieurs fois – ni ses parents. Joshua se tient dans l'encadrement de la porte. Joshua. Celui qu'elle a toujours considéré comme son petit frère, au même titre qu'Arjun. Celui qu'elle a tant aimé, tant adulé, tant chouchouté. Avec Valentina et Arjun, ils formaient un quatuor hors du commun. Magique. Plus fort que tout. La nostalgie la gagne presque tandis que leurs regards s'accrochent l'un à l'autre. Depuis combien d'années ne se sont-ils pas revus ? Mais Isana n'a pas le temps de le regarder, ni d'étudier les traits plus creusés de son visage. Voilà qu'en moins de quelques secondes, c'est à nouveau la porte d'entrée qui lui fait face. Ses paupières papillonnent de surprise. Elle en a imaginé des scénarios, mais celui-là, Isana ne l'avait pas vu venir.

Étant une Montgomery, une femme multimillionnaire qui plus est, Isana ne doit laisser personne, non personne, lui manquer de respect. Se faire claquer la porte au nez n'est donc pas habituel. D'ordinaire, les gens se précipitent plutôt pour la lui ouvrir en lui tirant leur révérence. Mais venant de Joshua Lorenzi, Isana ne se serait pas attendue à mieux après la décennie qui s'est écoulée, et la trahison faite envers Valentina. Si les retrouvailles avec les parents Lorenzi était redoutée, celle avec leur fils est encore plus crainte par la blonde. Mais visiblement, ils en resteront là. Isana n'aura donc pas à se justifier. Elle s'apprête à déposer le plat à gratin sur le bord de la fenêtre, lorsqu'elle entend la porte d'entrée s'ouvrir à nouveau. Ses doigts s'agrippent contre le plat de sa mère, alors qu'elle se tourne en direction de celui qu'elle a longtemps considérer comme son frère.

Son cœur s'accélère alors que Joshua s'adresse enfin à elle. Les mots qu'ils prononcent agissent tels le feraient des coups de poignard. Ils la forcent même à reculer, en bon mécanisme de défense. S'il croit qu'Isana est la seule coupable dans le divorce de sa sœur, il se trompe. Walter y a joué un rôle primordial. Il était d'ailleurs prêt à tromper Valentina avec Isana ; ce à quoi la blonde s'est toujours opposée. L'infidélité, ça n'a jamais été sa tasse de thé. Elle est trop bien, trop bonne, pour se contenter du rôle de maîtresse. Alors Walter lui a offert plus. Walter l'a choisie elle. Et maintenant, Isana est la principale héritière de sa fortune estimée à plusieurs millions de dollars. Les battements de son cœur s'accentuent tandis que l'italien parle de leurs parents respectifs. Le regard d'Isana se pose momentanément sur le plat qu'elle tient encore dans ses mains, alors qu'une pensée la traverse. Ses parents entendront parler de leur plan foireux ! Elle leur en veut instantanément.

Son sourcil droit s'arque alors que Joshua continue de parler de ses parents. S'il y a bien une chose qu'elle ne supporte pas Isa, c'est qu'on dise du mal d'eux. Se faire claquer la porte au nez était déjà une première attaque. Mais celui de manquer de respect aux Prakash, là c'est tout autre chose. Une mine dégoûtée fait grimacer ses lèvres tandis que son regard analyse plus en détails l'italien à moitié dénudé face à elle. Il a vieilli, le garçon. Elle ne peut s'empêcher de le relever, et même de reconnaître la serviette de piscine de son enfance. Celle avec des dauphins, dont Joshua ne pouvait jamais se séparer étant gamin. Reconnaître la serviette la pousse à esquisser un rictus moqueur au coin de ses lèvres, avant que ses iris azurs remontent jusqu'au visage de l'italien. Joshua continue de lui lancer des poignards en plein cœur mais la vision qu'il lui offre aide Isana à ne pas se laisser abattre.

– Vaffanculo, crache spontanément la blonde qui a appris l'italien en voyageant fréquemment avec les Lorenzi étant plus jeune. Dans son élan de colère, Isana se rapproche de Joshua et vient plaquer brutalement le plat à gratin contre son torse dénudé. Ce que j'ai fait ne te donne pas le droit de parler de mes parents de la sorte ! continue-t-elle de s'énerver avant de compléter : Mais soit. Puisque tu te l'autorises... Tu diras à tes parents qu'à l'avenir, s'ils veulent du poulet de ma mère, ils devront venir le récupérer par leurs propres moyens !

De là où elle se trouve, sous l'encadrement de la porte, Isana perçoit par-dessus l'épaule de Joshua le décor derrière lui. Les peintures ont changé. Elle croit reconnaitre en quelques secondes certains bibelots dans l'entrée, mais décide de ne pas s'y attarder plus que cela. Sentant la prise de Joshua autour du plat à gratin, Isana choisit de ne pas le lâcher pour autant. Elle s'y agrippe, bien désireuse de ne pas se faire claquer la porte au nez une fois de plus.

– Et pour info, Joshua, je ne suis pas la seule traitresse dans cette histoire, conclue-t-elle alors que son regard colérique croise à nouveau celui de l'italien. Ce n'est pas de Walter dont elle fait allusion, mais bien de Valentina qui a osé l'épouser et l'abandonner sans rechigner.

@Joshua Lorenzi & @Isana Montgomery

M’énerver n’était pas dans mes habitudes. Avec ma carrière, j’avais tout intérêt d’avoir une gestion de la colère tout simplement parfaite… Et avec le temps, ce n’était pas compliqué à gérer, et des situations rageantes, j’en ai eu. Dans un bloc, une chambre de patient ou bien même dans un bureau : un hôpital peut parfois être un enfer. Mais il faut réussir à tenir le cap car des vies sont en jeu et on ne peut pas se permettre de laisser le paramètre des émotions dans le flou, au risque d’en tuer plus d’un… Alors, la colère, c’était très rare que je le sois. Entre ça et ma bonne humeur, ma volonté de gérer les conflits, tout m’amener à être dans mes capacités pour rester calme et fiable… Mais là, Je n’avais aucune obligation pour elle, pas plus qu’à ce stade-là, elle ne mérite pas plus de respect que des déchets biologiques —encore que, non, eux pouvaient servir à des biopsies, ou comme je l’avais déjà entendu, des objets de décoration (?)… Ouais le monde hospitalier, c’était vraiment un autre univers. Toujours était-il qu’à cet instant, à ma porte, je n’estimais à devoir quoique se soit à cette femme.

Je voyais bien qu’au fur et à mesure que mon venin sortait, qu’elle était en train de se crisper, et ça me faisait bien rire intérieurement. Petite princesse ne devait plus être habituée à ce qu’on lui dise ses quatre vérités ? Le fait qu’elle soit plus riche que Crésus n’allait pas un seul instant lui accorder une sorte de politesse sociale. A ce stade, je n’en avais rien à faire des bienséances sociales. Un pot-pourri, aussi beau soit-il, reste un pot-pourri.

Des insultes en italiens ? J’allais réagir, mais l’arrivé du plateau sur mon ventre me terra dans le silence. Heureusement il n’était pas chaud, ni même trop lourd. Devais-lui renvoyer la balle ? L’idée de lui balancer son délicieux repas dessus m’a traversé l’esprit, c’était vrai. Mais méritait-elle que je gaspille de la nourriture pour une humiliation d’une basais indécente ? Non, clairement non. Et ce n’était pas l’étreinte qu’elle avait sur l’objet ni même son regard qui allait m’effrayer. Je n’avais qu’un geste, une seule balayette et la milliardaire était parterre, dans les jonquilles de ma mère… Elle avait tout intérêt d’être très prudente avec ses propos.

—Hawn, pauvre petit cœur, commençais-je avec une ironie étouffante, tu dois te sentir si seule à chercher constamment le conflit… Parce que là, tu vois un manque de respect pour tes parents là où il n’y en a pas, Isana. Tes parents sont formidables, eux. Tout ne tourne pas autour de toi.

Je tirais le plat vers moi, afin d’amener la jeune blonde un peu plus de mon propre visage. Vu mon regard noir, il n’était pas difficile de comprendre que là, la colère avait bien pris place.

—La seule traitresse de cette histoire ?

Je grimaçais grotesquement, comme si cette information me passait par-dessus l’épaule.

—Admettons un seul micro instant que cela vrai, hein, Isana, dis-moi bien une seule seconde que cela soit vrai… Est-ce donc ainsi qu’on est censé régler nos affaires en famille ? Oui, tu sais, ce qu’on était avant tout ça. Admettons, encore une fois, même que tout ceci soit l’affaire de Valentina, qu’elle est LA pétasse de l’histoire, suposons, pourquoi ne pas avoir chercher à arranger les choses dans une conversation ? Ne pas avoir demandé mon aide ou celle de mes parents, des tiens ou même de ton frère, mmh, Isana ?

Un rire s’échappa de mes lèvres, avant de continuer de répondre, sans lui laisser le temps de répondre.

—Pourquoi chercher à tout régler comme une vipère ? Et puis… Pourquoi es-tu constamment obsédée par ma sœur ? Toujours à te battre avec elle, t’es amoureuse, ou quoi ?

Et je dois dire que je ne m’attendais pas à une réaction pareille, mais une chose était certaine, je n’oublierai jamais ce visage.

@Joshua Lorenzi & @Isana Montgomery

( o u t f i t ) · Durant des années, Joshua Lorenzi a été une des personnes les plus importantes dans la vie de Isana. Non seulement un ami, il a été pour elle comme un frère, un confident. Sa proximité avec Valentina facilitant d'autant plus sa relation avec Joshua. Elle a veillé sur lui comme Valentina pouvait le faire ; comme une grande sœur. Joshua est celui qui connait chaque détail de son existence, chaque peine de cœur, chaque moment de joie, chaque coup durs ; en dehors de Tina et d'Arjun – son frère. Ils étaient proches. Réellement. Jusqu'à ce fameux samedi 9 novembre 2013, qui changea à jamais le cours de l'histoire. Le mariage entre Walter et Valentina a tout gâché, a piétiné tout ce qui avait de fusionnel entre les deux familles. Ce jour-là a probablement été le pire jour de l'existence de Isana. Celui où pour la seule fois de sa vie, Isana a supplié quelqu'un. Celui où elle a imploré Tina de ne pas épouser cet homme, sans trouver de sens à tout cela, des larmes roulant le long de ses joues. Mais face à son manque d'explication, Valentina l'a épousé et les deux femmes ont mis fin au lien pourtant indestructible qui les unissait. Depuis, Isana a passé des années à les esquiver, les Lorenzi. Même lorsque sa vengeance est venue et que Walter lui a passé la bague aux doigts, elle ne les a revu. Ils n'étaient que des fantômes de son existence, des vestiges d'une vie passée. Alors Isana n'avait encore jamais eu le malheur de recroiser la route de Joshua ; ni de se prendre le bec avec lui pour la première fois de leur existence.

Plus de dix ans après les faits, voilà qu'ils se retrouvent enfin. Qu'ils s'affrontent. Les paroles de Joshua sont blessantes et l'atteignent en plein cœur. Venant de n'importe qui d'autre, Isana ne l'aurait pas aussi mal pris. Tout cela lui serait largement passé au-dessus. Mais Joshua n'est pas n'importe qui. Entendre que ses parents sont formidables, eux, ça a forcément un impact. C'est douloureux. Insupportable, même. Isana a toujours su que Joshua aurait été du côté de sa sœur sans jamais essayé de comprendre le sens de cette histoire ; tout comme Arjun a été de son côté à elle. C'est leur rôle de frère, de les protéger. Pourtant, la réalité fait mal. Elle est dur à supporter, tant et si bien que ça la met hors d'elle, Isana.

Lorsque l'italien attire le plat vers lui, Isana se sent plaquer contre son corps. Ses sourcils se froncent face au regard noir qu'il lui lance. S'il pense lui faire peur ainsi, c'est loupé. Joshua Lorenzi ne lui fera jamais peur. Ce n'est qu'une grande gueule ; au cœur si grand qu'il serait incapable de faire du mal à une mouche. C'est en tout cas ce qu'elle a toujours pensé Isana, raison pour laquelle elle l'affronte sans redouter de se recevoir un poing au milieu de son visage. Elle soutient donc son regard, et lui lance un regard encore plus sombre, mauvais même. Qu'il ne la cherche pas trop. Des deux, elle est celle qui a le plus de moyens de l'abattre ; de détruire son infime existence.

Bizarrement, Joshua semble s'interroger. Il cherche à en savoir plus sur ce qu'elle pense. C'est en tout cas l'image qu'il lui renvoie alors qu'il réfléchit à haute voix aux mots dont elle vient d'user. Isana n'aurait pas associé Valentina à une pétasse ; puisque ce n'est pas ce qu'elle lui reproche. La seule trahison qu'a faite Valentina – de ce qu'elle sait Isana, puisqu'elle ignore que Walter l'a trompé avec Tina – c'est l'abandonner au profit de ce vieux Walter. Elle l'a planté devant le pas de la mairie, ce fameux 9 novembre 2013 ; mettant un terme à leur amitié fusionnel pour une amourette.

– Comme si te demander de l'aide aurait arrangé quoique ce soit... Tu n'en as jamais rien eu à faire, fait-elle grincer entre ses dents alors qu'elle soutient le regard de l'homme.

Il ignore tout de son point de vue, Joshua. Il ignore à quel point Isana a souffert de la perte de sa meilleure amie. À quel point elle a fulminé durant des semaines, des mois, pour comprendre pourquoi elle refusait que Valentina épouse Walter. Même en 2024, elle n'a toujours pas la réponse à cette question ; bien loin de comprendre et de réaliser les sentiments amoureux qui y étaient mêlés. Parce que dans le fond, c'est la triste réalité. Isana était amoureuse de Valentina, et a eu le cœur brisé le jour de ce mariage. Des sentiments dont elle n'a toujours pas pris conscience, et qu'elle nierait en bloc si elle les découvrait. Parce qu'elle n'y croirait pas Isana, et qu'elle a déjà bien du mal à assumer sa bisexualité. Orientation sexuelle qu'elle s'est découverte peu de temps avant d'épouser Walter à son tour, dans le lit de la belle Camila Castillo.

Visiblement, Joshua se fiche de son point-de-vu. Son rire fait s'hérisser les poils de la blonde, il la dérange. Joshua se fiche d'elle, et en avait en fait rien à faire de ce qu'elle a pu vivre de son côté. Il ne voulait pas comprendre ; juste la blesser et lui faire plus de mal encore. Le surnom de vipère qu'il lui attribue la fait lever les yeux au ciel. Pas besoin d'échanger plus longtemps sur ce sujet, Joshua n'en a fichtrement rien à faire. Il veut juste défendre sa sœur chérie, rien de plus. Persuadée que leur entretien va s'interrompre là, Isana lui lance un dernier regard mauvais. Nul besoin de lui répondre. Tout ce qu'elle lui dirait serait interprété et déformé par l'italien. Prête à prendre la fuite, comme elle y avait pensé quelques secondes plus tôt, la blonde se fige finalement. Toujours collée à Joshua, elle ne bronche plus. Son corps semble la lâcher, tandis que le brun sous-entendant son obsession vis-à-vis de Valentina, et lui demande si elle est amoureuse. Pour se soutenir et éviter ses jambes de la lâcher, Isana s'agrippe à Joshua. Ses faux ongles se plantent dans la chair des mains de Joshua.

Le temps s'est arrêté.
Le monde s'ouvre sous ses pieds et Isana semble tomber en plein dans cette crevasse.
Ces mots, elle ne les avait jamais associé à Valentina et certainement pas à leur histoire compliquée. Le cours de ses pensées s'emmêle. Ses cils papillonnent, se joignent et de déjoignent. Un couteau semble avoir pénétrer les parois de son cœur. Quelle est cette drôle de sensation ? Soudainement, elle a l'impression d'étouffer. Comme si on venait de l'abattre d'un claquement de doigts.

Isana Prakash Montgomery est réputée pour sa carapace intouchable, indestructible. Elle est connue pour la gestion de ses émotions et est parfois vu comme une personne insensible. Mais ceux qui la connaissent savent ce qui se cache sous cette coquille sans faille, sous ce masque. Elles ne les sent pas, pourtant des larmes perlent au coin de ses yeux alors qu'un rire mauvais s'échappe d'entre ses lèvres. Elle réagit enfin.

– Moi ? Amoureuse de cette femme ? Plutôt mourir ! répond-elle méchamment alors qu'elle repousse violemment Joshua en arrière. Elle y met toute la force possible et inimaginable. En attendant, tout ce que je vois, c'est que t'es devenu un pourri. Un sale type. Défends-la ta frangine, fais-en ce que tu en souhaites, mais ne viens plus jamais me parler d'elle !

Elle aimerait tourner le dos. Elle aimerait prendre la fuite, Isana. Mais ses pieds sont collés au sol. C'est même pire que cela. Elle a l'impression que si elle décolle ses pieds, ses jambes la lâcheraient dans la seconde. Elle est incapable de bouger, incapable de prendre la fuite. Pas alors que les mots de l'italien raisonnent encore dans son esprit. Amoureuse de Valentina... Et puis quoi encore ?!