larme fatale (loïs)
BROKEN HEARTS CLUB.
Vous souhaitez réagir à ce message ? Créez un compte en quelques clics ou connectez-vous pour continuer.

Broken hearts club est un forum city basé sur l'amour où l'action se déroule à Brisbane, en Australie. BHC est un forum simple et sans prise de tête où le but est de se faire plaisir, de se détendre et de faire des rencontres.Chez nous, le respect de tous‧tes et la bienveillance font partie de nos valeurs, car il est important pour nous de faire de ce forum un endroit safe pour tous‧tes. N'hésitez pas un seul instant à contacter harlan myers, dora oliveira et scott reeves, vos admins, si vous avez la moindre question ou le moindre problème.
les rps libres
aucun rp libre
-35%
Le deal à ne pas rater :
Pack Smartphone Samsung Galaxy A25 6,5″ 5G + Casque Bluetooth JBL
241 € 371 €
Voir le deal

 larme fatale (loïs)


Declan O'Toole
----------------------------------
MEMBRE ☆ midnight love
i'm not your consolation prize
Declan O'Toole
paper rings
messages : 25
rps : 3
pseudo : youngblood.
id card : harris dickinson - eyesome (ava) - staff bhc (code sign), ynejr (icons)
pronom irl : elle
multicomptes : sierra, sailor, kendall, ilsa & jolene
à contacter : sierra.
présence : présence réduite.
larme fatale (loïs) 13.1
âge : 27 ans.
statut civil : célibataire aux émois sans envergure ; trop égoïste pour s'adonner à des romances délétères, il leur préférera toujours des tendresses éphémères.
occupation : tennisman, joueur obsessionnel qui a élevé son sport au rang d'art, persuadé que nul sacrifice n'est trop grand pour la victoire.
adresse : 206, fortitude valley, colocation trouvée par hasard, sous l'impulsion de son coach, inquiet de le voir vivre seul après ses dernières frasques ; contre toute attente, il s'est pris d'affection pour les lieux et surtout ses habitants.
intervention pnj : Oui
pronom perso : il
trigger : tout ce qui touche de près ou de loin à l'inceste ou la pédophilie // les descriptions de viol, agression sexuelle, violence conjugale // la romantisation de relations avec gros écart d'âge.
warning : relation coach/élève malsaine, contacts physiques inappropriés, dépression, consommation de drogue, overdose, deuil.
infos rp : présence : quotidienne, réponses entre 1 et 4 semaines, selon l'inspi et le temps.
style rp : j'écris en il ; entre 300 et 1500 mots, selon le rp, l'inspi, etc.
dialogues : en yellowgreen, français ou anglais.

en vrac : everything i wanted, w/ leo.
kisses to my exes, w/ nilsa.
larme fatale, w/ loïs.
feels like home, w/ astro roomies.

présentation : présentation
fiche de liens : fiche de liens
blank space

· Dim 8 Sep - 0:47

larme fatale

@Loïs Paxton - tw : addiction.

« T'as prévu de prendre la parole, aujourd'hui ? »

Une distraction pour l'œil morne, jusqu'alors tourné vers un ciel peu assorti à son esprit. Un soleil éclatant, à en friser l'insolence. Et c'est ce qu'ils osent appeler hiver. C'est plus sombre, dans sa tête. Nuageux, plutôt que bleu. Un vrai hiver, à l'anglaise, froid et pénétrant. Brisbane est en inadéquation avec sa réalité, comme souvent. Et ça l'emmerde, Declan. Comme s'il n'avait rien à faire là, engoncé dans son sweat-shirt qui s'avérera vite trop chaud – une rébellion tant qu'une cotte de mailles, fomentant sa combustion. Il en a relevé la capuche, ayant au moins la jugeote de jouer du jeu d'ombres projeté sur son visage, en guise de déguisement. Chester l'a reconnu, bien sûr. Cela fait suffisamment de temps qu'il voit Declan errer dans son groupe de soutien, généralement dans ce genre d'accoutrement. Le genre d'homme qui observe sans en avoir l'air. Et qui écoute, surtout : Declan ne serait pas surpris de l'entendre rappeler l'histoire de chaque personne l'ayant un jour racontée, ne serait-ce qu'une fois, dans cette salle. Au fil des mois, la voix de Chester est devenue une constante familière, rassurante, tout comme sa discrétion bienveillante. Ce qui l'inquiète, ce sont les inconnus qu'il a vus se succéder à l'entrée. S'il s'est habitué à voir, à peu de choses près, les mêmes têtes au fur et à mesure des réunions en petit comité, celle-ci a exceptionnellement été ouverte à un plus large public. Des victimes d'addictions, et des victimes collatérales. Declan est les deux, comme l'a si justement souligné son coach – détesté pour l'occasion, lui qui a si fréquemment raison. Il a été le junkie, et celui à qui la drogue a tant pris. Il lui semble en avoir suffisamment conscience pour s'épargner de ressasser sa propre histoire au travers d'étrangers qui ne partagent avec lui que la tragédie d'avoir perdu quelqu'un dans ce fléau. Mais il faut reconnaître que les conseils de son entraîneur ne l'ont jamais desservi, et que Declan, lui, est trop honnête pour prétendre devenir meilleur sans réellement faire des efforts en ce sens.

C'est tout juste s'il a tressailli, trop attaché à son immobilité de statue : la réponse ne se fait pas attendre, pourtant. « J'en sais rien. J'avais préparé un… un discours, un truc du style, enfin, tu vois. Et maintenant… Je sais pas. Y'a un peu trop de monde pour moi, je crois. J'ai pas envie de me faire remarquer. » Pas de timidité mal placée : de toutes ses afflictions, ce n'est pas un trait de caractère dont il souffre. Mais, vu le volume qui s'est déjà engouffré dans le bâtiment, les probabilités que quelqu'un le reconnaisse ne sont pas ridicules. Pas si élevées, bien sûr, mais pas ridicules. C'est quelque chose dont ils avaient déjà parlé, avec Benny. Que sa santé passait avant ce genre de risques, si délicats soient-ils, et que personne ne pouvait lui reprocher une addiction passée, tant que ses tests de dopage revenaient impeccables. Declan s'était dit que cet optimisme avait quelque chose d'un peu facile, tant qu'ils étaient dans le domaine de l'hypothétique. Si ses problèmes venaient à se savoir, on ne lui pardonnerait pas si aisément. Qu'importent les résultats de tests, on remettrait toute sa carrière en question. On le huerait à chaque occasion. Autant jeter l'éponge dès que le scandale éclaterait – ou s'assurer que le secret en reste un. « Fais ce qui te semble le mieux, Declan. » Est-ce une pointe de désapprobation, qui perce la voix de Chester ? Bien sûr que non. Il nage dans un délire – sa phobie toute personnelle, handicapante, de décevoir chaque personne qu'il croise, quand bien même celles-ci ne sont pas assez proches de lui pour qu'il suscite un tel sentiment. « Ne tarde pas à entrer, ça s'est déjà bien rempli : je pense qu'on va commencer d'ici cinq minutes. » Declan acquiesce, se tord le cou pour voir Chester disparaître par la porte. Une inspiration, un coup d'œil sur les alentours. Cinq choses qu'il voit, quatre qu'il peut toucher, trois sons, deux odeurs et un goût. Comme s'il n'était pas trop tendu pour tenir des listes – damné soit son thérapeuthe. Expiration, quand les poumons picotent. Cette méthode-là ne lui a jamais fait défaut.
S'étouffer et, in extremis, se sauver.

Les chaises sont en rang, pas en cercle. Prévisible, puisque seule cette configuration permet d'accueillir toutes les personnes s'étant déplacées, mais pour Declan, c'est l'équivalent d'un territoire inconnu, pour ne pas dire hostile. Par chance, il reste un siège à l'avant-dernier rang. Il suffit de s'y asseoir et de ne pas bouger, jusqu'à la fin. D'oublier que l'immobilité lui réussit rarement. Une fois installé, il relève enfin les yeux, à temps pour voir Chester s'adresser à la foule. « Bonjour et bienvenue à tous, merci d'être venus nombreux. Pour ceux qui ne me connaissent pas, je m'appelle Chester. J'organise des réunions de narcotiques anonymes ici depuis cinq ans, et je suis moi-même sobre depuis huit ans. Le format est un peu différent aujourd'hui car cette rencontre n'est pas ouverte qu'à celles et ceux qui combattent une addiction, mais à toutes les personnes qui ont été touchées d'une manière ou d'une autre par la drogue. On sait combien le dialogue et l'écoute sont précieux, c'est pourquoi j'espère que les échanges que vous aurez cet après-midi pourront vous apaiser, vous aider à trouver les réponses que vous cherchez peut-être, et vous donner des raisons de continuer de vous battre. N'oubliez pas que, quelle que soit votre histoire, vous n'êtes pas seul. » Le silence qui règne est preuve de consensus : Chester sait parler, inspirer, c'est ce qui avait le plus marqué Declan, la première fois qu'il l'avait rencontré. Et ce dernier y croirait presque, à ce discours, au bien-fondé de sa propre présence là, alors qu'il en doutait encore, quelques minutes plus tôt. « Je vais passer la parole à ceux qui veulent la prendre, n'hésitez pas à vous manifester. » Quelques personnes se succèdent. S'il fait de son mieux pour les écouter, Declan a du mal à se sortir de ses pensées. C'est ce qu'il craignait, que ses propres souvenirs prennent le dessus. Des mois qu'il est sur la brèche, il n'a jamais eu l'orgueil de se croire guéri – mais, parfois, le temps s'écoule d'une telle manière qu'il goûte à l'oubli. Et les déclencheurs brutaux n'en sont que plus cruels.

« Merci d'avoir partagé votre vécu. Est-ce que quelqu'un d'autre voudrait nous raconter quelque chose ? » Il lui semble que le regard de Chester glisse sur lui – c'est imperceptible, sûrement même pas vrai, mais suffisant pour qu'il baisse la tête, comme un écolier voulant à tout prix éviter une prise de parole. Au diable, ce que ce Declan s'était imaginé dire. Ce sera pour une autre réunion – une moins… originale. Le temps lui paraît suspendu, tandis qu'il attend que quelqu'un choisisse de reprendre le flambeau, pris en otage par le silence oppressant.
Peut-être qu'il préférait les écouter parler, finalement.


_________________
(smoke signals) one of your eyes is always half-shut, something happened when you were a kid. I didn't know you then and I'll never understand how it feels like I did.
Revenir en haut Aller en bas
Loïs Paxton
----------------------------------
MEMBRE ☆ old wounds
you got a little more to prove
Loïs Paxton
paper rings
messages : 12
rps : 1
pseudo : eigengrau.
id card : kaya scodelario. © self (av + gif) bluesartgent (gif)
pronom irl : elle/she
multicomptes : theo (n.saavedra), kleo (a. bratt), haydar (b. kuzum)
à contacter : theo.
présence : présente.
larme fatale (loïs) Tumblr_nefxcs5b6K1qc354ro6_r1_250
âge : trente-et-une années, horloge brisée depuis trois ; posez-lui la question, et Loïs rechignera à se dire encore vraiment vivante. Tout juste spectre — à peine vacillante.
statut civil : célibataire ; confond le toucher des amants avec celui des partenaires perdus, la danse des corps étreints avec toutes celles qu’elle ne connaîtra plus.
occupation : il y a bien une époque où elle se disait danseuse avec fierté, elle le disait en souriant, en redressant le nez. Désormais immobile derrière le bureau d’accueil d’un cabinet d’avocats, le mouvement de poignet pour répondre au téléphone est bien la dernière danse qu’elle s’accorde, ces jours-ci.
adresse : west end.
intervention pnj : Non
pronom perso : elle/she
trigger : injection de drogues, romantisation des relations toxiques, age gap 15+, grooming, agressions sexuelles.
warning : dépression, deuil, validisme internalisé, blessure physique, tca.
infos rp : • entre 700-1600+ mots, en fonction du type de rp.
• dialogues uniquement en français.
• réponses souvent sous dix jours.

disponibilités : 0/3 — à discuter en mp.
en vrac : larme fatale (loïs) 22a8


— jeux en cours :
uc
uc
uc

présentation : présentation
blank space

· Ven 13 Sep - 11:32

larme fatale

@Declan O'Toole — tw : mention d'inégalités sociale, addictions, consommations de drogues dures, deuil, perte d'un proche, overdose mortelle.

Est-ce que tu vas y aller, finalement ?

Elle a les yeux qui se perdent hors de la fenêtre, qui dépassent l'alu de l'encadrement pour en bouffer l'extérieur, oublier ce qui se passe en dedans. Du bleu dans du bleu sur du bleu, du bleu qui danse et des immeubles de fer qui jouent avec. Brisbane est presque paisible à cette heure du jour, on oublierait presque en quoi le quartier se transforme une fois le noir éclot et les étoiles levées ; lorsque s'échappent les rats au milieu du rien, de cette nuit qui poisse, contre les lumières qui chialent toute la fatigue de la rue. Elle a l'air stoïque et absolu des statuaires lorsqu'elle réfléchit, la pupille qui tremble et grignote le paysage comme pour y trouver des réponses. Lorsqu'elle était petite, c'était la neige à l'infini, qui l'aidait à penser ; ici il a fallu trouver autre chose, les lignes d'horizon qui s'étalent au loin, la mer qu'on devine sous le soleil et dans le cœur des oiseaux. Elle peine à y trouver la poésie que son iris mendie, puisqu'elle a vu les travers de la cette ville : ici on comprend vite que quand on est pas riche, on est plus pauvre d'ailleurs, alors on se met à en voir un tas d'autres choses que les gens normaux ne voient pas. Les recoins, les replis, les endroits où se terrer et les murs contre lesquels se plaquent ceux qui portent la honte de n'avoir pas réussi. Loïs se trouve à la frontière exacte entre les deux mondes, sur le fil qui les traverse. Elle se débrouille assez bien avec son salaire de standardiste pour pas avoir à crever la dalle, écoute toute la journée la crème de la fils-de-puterie du droit pénal parler de millions, mais croise le soir des types racler les fonds de poubelles des fast-foods de son quartier. Elle connait la Brisbane des nantis et des tailleurs serrés, des quartiers qui jamais ne s'éteignent et brillent trop fort pour que n'apparaisse ce qui tombe d'en-haut ; mais chaque jour, elle retrouve Brisbane la grise, celle des oubliés au cœur de fer, des acharnés au sol, qui reniflent le ciel pour constater qu'en lui comme en eux, la lumière est partie. Et si l'injustice l'étrangle, elle n'est même plus vraiment en colère : ça aussi, elle avait essayé. Mais elle avait fini par se lasser de la rancoeur, qui avait fini par porter le goût fade de l'habitude.

Je sais pas si c'est une bonne idée.

Elle ne sait plus si elle avait attendu deux secondes, deux minutes ou deux heures, pour répondre à Lula. Le regard de sa colocataire traine sur son épaule, et elle sait bien qu'elle n'est pas sûre de quoi lui dire. On sait jamais trop quoi conseiller à ceux qui ont tutoyé le deuil, on se sent vite comme une merde d'imposteur, de donneur de leçons. C'est comme voir la mort comme une recette de cuisine, ajouter une pincée de résilience, une cuillerée à soupe d'oubli et deux grammes de Lexomil. Chacun deale à sa manière, et même les camés du chagrin oseraient pas se filer des conseils entre eux. Parce qu'ils savent bien que chaque fantôme est différent, et hantent les cœurs et les côtes d'une façon propre ; qu'ils grignotent les coins de leurs tristesses par des bords opposés, dans la chaleur invisible de ceux qu'on ne peut pas voir, pas distinguer. Tout ce qui leur reste, c'est de parler de leurs fantômes, de se réunir façon Ghostbusters ratés, pour expliquer aux autres à quel point ils échouent chaque jour un peu plus à éradiquer celles et ceux qui les hantent, qui les retiennent sur les bords d'un chagrin infini.

Mais Jan, moi je ne veux pas te chasser. Si tu veux tu peux rester, en moi, contre moi, rester pour voir avec moi comme la ville est grise et comme les rats courent, sur les trottoirs et dans ma tête.

Fais ce qui te semble le mieux, Loïs.

Pendant des mois, c'est exactement ce qu'elle a fait. Prendre la mort comme recette de cuisine, suivre les étapes scrupuleusement, passer du déni à la colère, de la colère à la tristesse. Tristesse tellement triste qu'elle avait fini par la conjurer d'un rire qui en elle tuait trop de choses, un rire au milieu du désastre de sa vie trop vide sans lui. Puis elle avait arrêté. Elle ne savait pas vraiment si c'était un abandon ou autre chose, mais ça lui avait fait du bien. Elle avait arrêté de s'obliger à quoi que ce soit, de peindre le visage qu'elle voudrait faire prendre au deuil avant même de le vivre ; mais maintenant, elle ne savait plus trop ce qui était le mieux pour elle, ce qui aurait risqué de creuser en elle des trous de chagrin et de solitude, reconnaître les pioches qui pilonnaient sa poitrine. Pour ce qui était de la tristesse aussi, elle vivait sur le fil.

*

C'est une appréhension bizarre qui la tenaille, aux portes de la salle déjà remplie. Il y a trop de monde, trop d'oreilles pour écouter, trop de fantômes tenus en laisse qu'elle ne peut pas voir mais qui hantent la salle en gémissant, en aboyant. Ça se voit qu'ils ont essayé de tout faire pour les mettre à l'aise ; y'a une odeur de café qui flotte dans la salle, et la fille à côté d'elle secoue frénétiquement le pot de cannelle au dessus de sa tasse, visiblement décidée à transformer sa boisson en pain d'épices. Même les biscuits sur la table ont l'air moins secs que d'habitude, cakes maison enroulés dans leurs papiers alu réconfortants qui disent l'amour que tous ont pour ces chers inconnus, ces cassés-du-cœur.
Plus loin, elle reconnaît Chip, un garçon qu'elle voyait souvent aux réunions avant. Il pousse une petite exclamation dès qu'il la voit, lui claque une bise sonore direct en enroulant son bras derrière sa nuque. Elle aime pas trop les embrassades dans ce genre là pourtant, mais Chip est adorable, alors c'est difficile de lui refuser. Il est tellement triste qu'il rigole tout le temps, petit corps d'adolescent pour contenir toute la peine d'un massacré. Il l'appelle chou ou chérie, change de couleur de cheveux toutes les deux semaines (aujourd'hui, il a les tifs tellement blanches qu'il foutrait la honte à un renard polaire) et l'admire tellement qu'il se demande ce qu'elle a pu dire pour qu'il la voie comme ça. Il s'est assis au premier rang comme un espèce de fayot, pour être bien certain d'être aux loges d'honneur pour admirer leur prière commune, la splendeur du désaxage qu'ils portent tous et qu'ils dégueulent un à un. Ça l'emmerde un peu Loïs, parce qu'elle préfère rester planquée au milieu des autres désaxés, mais elle a pas trop envie d'être seule donc elle s’assoit à côté de lui.

Les prises de parole sont toujours hésitantes, au début. C'est normal, personne n'a envie d'être le premier à avouer qu'il s'en sort pas, qu'il nage à la surface de la misère des autres avec la peur d'un jour se voir chopper le pied par en dessous pour couler. Mais une fois qu'on a tous pigé qu'on était hors-circuit, à courir comme des dératés derrière des wagons qu'on attrapera jamais, ça va mieux. Les gens se détendent et commencent à raconter des dingueries, même des trucs qu'on a pas envie d'entendre. C'est le jeu. On vient pas là pour se faire brosser dans le sens du poil mais pour se faire un peu tabasser, et en général si on ressort en chialant à gros torrents c'est que quelque chose a fonctionné.
Le dernier type a raconté la manière dont il était devenu un espèce de Yes Man petit à petit, à dire oui à toutes les cames possibles, se les foutre dans le gosier sans discrimination dès qu'on lui en tendait. Il avait raconté comment la dernière fois il s'était senti cramer, dépasser les limites rouges de sa propre tolérance, couler au fond d'une misère bien chienne qui lui avait collé le cerveau aux parois du crâne. Ça l'avait tellement fait flipper qu'il avait essayé de tout arrêter, il disait, j'ai honte de ce dans quoi j'ai trempé mon âme je vous jure, j'avais le corps noir et la tête qui partait dans le siphon du lavabo avec tout ce que j'étais qui coulait dedans. Il disait, j'ai eu peur de crever, mais j'ai encore plus peur de pas avoir envie d'arrêter.

Ça avait foutu un espèce de blanc, de voir ce gamin de même pas vingt ans raconter ces histoires de came qui te déboulonnent le crâne. Mais peut-être qu'elle ne pouvait parler qu'après ça, justement ; après l'horreur vécue de l'intérieur, parce qu'il fallait raconter la suite de l'histoire. Alors elle ne sait pas trop pourquoi, mais elle lève la main. À ses côtés Chip se tord le cou pour la dévisager, parce qu'il sait qu'elle cause jamais beaucoup, qu'elle préfère écouter. Et lorsqu'on lui offre la parole, qu'elle sent autour d'elle toutes les oreilles se déployer et les fantômes de chacun s'agiter, elle regretterait presque de pas être restée tranquille à attendre que ça se passe. Loïs a la bouche sèche soudain, alors elle fixe un point plus loin – l'imper au tissu blanc vif que Chester a laissé trainer sur le dossier d'une chaise. Ça ressemble vaguement à de la neige, alors ça l'aide à se concentrer.

J'ai perdu mon meilleur ami. Celui avec lequel je parlais et parfois non mais qui pigeait quand même, qui me prêtait des thunes, qui me servait des shots douteux quand ça allait pas, celui qui avait tout dansé avec moi, qui connaissait mon corps, ma tête, mes obsessions, le nom de tous mes os, je l'ai perdu. C'était une nébuleuse, Jan. Un espèce de cœur trop fort et trop solide autour duquel il faisait graviter tellement de gens qu'il m'en foutait le tournis, et moi j'avais l'impression qu'il pourrait jamais s'écrouler. Qu'il serait toujours plus grand, les mains noués à des flots d'énergies qu'on voit pas mais qui sortent de partout en crevant la Terre. Parce qu'il m'a toujours portée, et qu'il m'a jamais laissée tomber. Et puis il se moquait tellement de l'idée de la mort que j'ai fini par le croire, par me dire que y'avait rien ici qui pouvait le foutre au sol. Un truc comme quoi les nébuleuses ne connaissent pas la gravité. » Elle marque un temps de pause et elle ferme les yeux, Loïs. Son dos s'appuie sur le dossier de la chaise en plastique et elle lève le menton, pour voir se dessiner derrière ses paupières les ombres des néons blancs. « Il est mort un soir, tout seul dans les chiottes d'une boîte de merde. Il est mort tout seul, dans une cabine qui pue la pisse et la baise et la solitude, tout seul sans sa galaxie, juste parce qu'on était trop occupés à le voir briller pour faire attention à ce qu'il se foutait dans le nez. Pour lui demander si lui aussi il avait besoin porté.

Revenir en haut Aller en bas
larme fatale (loïs)

BROKEN HEARTS CLUB. :: 

brisbane, australie

 :: 

south bank & west end