rp libre

T’aimes bien ces vendredis. Ceux qui marquent la fin d’une longue semaine de travail. Le cabinet est ouvert demain matin, mais c’est ta collègue qui sera présente, tandis que toi tu pourras enfin relâcher un peu la pression. Il faut dire que la semaine a été plutôt intense. Tu ignores ce qu’il y avait dans l’air, mais tu t’es retrouvée à plusieurs reprises à devoir recoller les morceaux après des bagarres de chiens, comme s’ils s’étaient tous passés le mot. Et si on ajoute à ça plusieurs opérations plus ou moins complexes, et les rendez-vous de routines habituels, ça a donné une semaine où, une nouvelle fois, tu n’as pas compté tes heures.

Aussi, c’est avec beaucoup d’impatience que tu attends ce week-end. D’autant plus que t’as des plans fort sympathiques pour le samedi. Une sortie au zoo avec les enfants de ton frère - même Shiloh, qui a rechigné un peu au début avant de se laisser convaincre. Ça te fait d’autant plus plaisir que tu sais que le jeune homme passe par une phase compliquée en ce moment, et t’espère que de passer un peu de temps sans parents, juste avec toi, son frère et sa soeur, ça lui fera du bien.

Tu redoutes un peu plus dimanche, et le traditionnel repas de la famille Powell. D’abord, parce que plus ça va, et moins tu t’y sens à l’aise. Tu trouves de plus en plus de points de discorde avec tout le monde, tu participes de moins en moins aux conversations - avec les “adultes” du moins - pour éviter de risquer les embrouilles. Tu te contentes de venir, tu hoches la tête avec lassitude aux commentaires de ta mère, et tu profites juste de voir tous tes neveux et ta nièce. T’as récemment eu avec l’un deux, notamment, l’un des fils de ta sœur, des discussions très importantes, et profondes - lui aussi se cherche, se questionne, et a besoin d’un soutien qu’il ne sait pas forcément où trouver. Et si ta mère désespère toujours de te voir un jour mariée et mère de famille, toi, pour l’instant, ce rôle te convient parfaitement. Celui de la tata a qui on aime parler, en qui on a confiance.

Bref. Tout un week-end en perspective, et l’heure de fermer boutique approche à grands pas. Tu commences déjà à mettre de l’ordre dans la salle d’examen, à t’assurer que tout est prêt pour demain matin, quand la clochette de l’entrée retentit. Ton auxiliaire étant occupée à l’arrière avec les animaux qui passent la nuit ici, tu sors de ta pièce pour aller accueillir l’arrivant. “Bonjour.” Tu remarques immédiatement que l’animal qui l’accompagne semble mal en point, et tu ne perds guère de temps. “Qu’est-ce qu’il s’est passé ?”

hj:

new farm, vet clinic • w/ @Marnie Powell

tw // animal blessé

ce n’est pas la première fois que Santiago dépose un animal souffrant entre les mains du vétérinaire le plus proche, et sans doute pas la dernière. au fil du temps, et particulièrement depuis qu’il sillonnait les plaines australiennes à cheval, il était venu en aide à des tas d’animaux différents. serpents, rongeurs, rapaces de toutes les sortes, chats et chiens errants ou abandonnés. il avait croisé et secouru quasiment toutes les catégories composant la faune de leur région, toujours avec calme et sang-froid - c’était le comportement à adopter, en cas de rencontre inattendue, peu importe que l'espèce soit potentiellement dangereuse ou non. l’expérience lui avait appris que les réactions agressives étaient toujours explicables, d’une façon ou d’une autre. qu’il s’agisse de défendre leur territoire ou de protéger leurs petits, aucun animal n’attaquait par pure méchanceté, la volonté simple de nuire - à moins qu’il n’y soit poussé. l’humain, en revanche, était un cas à part et parfaitement capable du pire, pour des raisons qui tenaient rarement la route quand il était question de faire du mal à une créature. c’est d’ailleurs à cause de l’humain et de sa bêtise qu’il se trouve là ce soir, comme c'est souvent le cas.

au-dessus de sa tête, la petite clochette caractéristique retentit en passant le seuil mais il n’y prête pas vraiment attention, concentré sur ce qu'il transporte délicatement contre lui. un museau de chat émerge des replis de la veste dans lequel l’animal est emmitouflé, comme un colis précieux ; s’en suit un miaulement aigu et quelque peu dramatique qui lui tire une grimace chagrinée. « je sais, je sais... c’est bientôt fini. » souffle-t-il au félin en question, qui observe curieusement les alentours de ses grands yeux verts. une poignée de secondes plus tard, une femme se présente à lui. un "bonjour" répondu un peu mécaniquement, par politesse, il s'apprête à lui exposer les raisons de sa venue, comme si la boule de poils qui se tortille dans tous les sens dans ses bras n'était pas un indice suffisamment clair. finalement, c'est qu'elle qui prend les choses en main, avec une première question à laquelle Santi n'a malheureusement pas de réponse bien précise à donner. « on ne sait pas vraiment. » soupire le guide, dépliant tant bien que mal quelques pans de tissu pour laisser entrevoir plus que la seule tête du félin. d’apparence, rien d’anormal si ce n’est son poil sale et plein de poussière. le problème se trouve ailleurs mais, connaissant le spécimen, Santi n'a pas l'intention de le libérer avant d'être entré dans l'une des salles d'examen. « il avait disparu depuis plusieurs jours. je l’ai retrouvé avec la patte coincée dans du fil de fer, un genre de piège peut-être, j’en sais rien. » explique-t-il, rassemblant le peu de détails dont il dispose. une dizaine de chats résident dans les alentours du ranch Bradshaw, certains moins présents et plus explorateurs que d'autres. si Jack fait sans conteste partie des plus casse-cou de la bande, il est aussi le plus casanier d'entre eux, habitué à nicher dans les écuries ou à lézarder au soleil pendant des heures. il partait rarement et jamais très loin, constater sa disparition l'avait donc aussitôt alarmé, et Santiago avait ratissé les environs dans l'espoir de le retrouver. « j’ai essayé de le faire boire un peu, mais il ne s’est pas montré très coopératif… » en témoignent les quelques griffures rouges vif qui zèbrent la peau de son avant-bras - raison pour laquelle l'animal est soigneusement enroulé dans sa veste. des réactions causées par la douleur, rien dont il puisse lui tenir rigueur. « vous pouvez vous occuper de lui ? il s’appelle Jack. »

@Marnie Powell je me permets