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o u t f i t · Elle ne voit pas la matinée passer, Disha. Entre les clients qui défilent, les coups de fils à passer et la tonne de paperasse que sa patronne lui dépose sur le coin de son bureau tous les matins, la Weaver a de quoi se tenir bien occupée. Aussi, elle ne peut contenir le long soupir de soulagement qui s’extirpe de sa bouche lorsque Madame Badgley annonce à son assistante qu’elle va devoir s'absenter pendant plusieurs heures pour passer un examen à l'hôpital. Il faut dire que l’accouchement est pour bientôt ; sans vraiment y croire, Disha espère secrètement que l’arrivée du bébé calmera l’humeur très lunatique de sa cheffe.

L’agence est calme durant la pause du midi ; la jeune femme en profite pour travailler d’arrache-pied sans interruption, ne s’arrêtant même pas pour aller s’acheter quelque chose à manger. Ça en devient presque une habitude, une mauvaise habitude que sa colocataire a bien remarqué lors de leur dernière entrevue au centre commercial. Disha ne mange presque plus rien si on ne la force pas à le faire. Elle a tout de même repris quelques kilos, puisque sa meilleure amie s’assure que la brune avale au moins un repas complet par jour. Mais lorsqu’elle est seule comme à cet instant, il lui est encore difficile de se forcer. Elle finit tout de même par se raisonner et engloutit difficilement cette barre de céréale que Holly lui a glissée dans son sac ce matin, des grosses perles humifiant ses yeux et roulant sur ses joues. Elle se sent tellement ridicule, que ça soit si difficile pour elle de manger une simple sucrerie, d’en être presque dégoutée à chaque bouchée. La perspective qu’Aaron doive passer dans l’après-midi lui met au moins un peu de baume au cœur et l’encourage à se remettre doucement de ses émotions.

Sa patronne l’appelle sur les coups de quatorze heures pour l’informer que son absence durera plus longtemps que prévu, sans pour autant lui donner davantage de détail ; en fait c’est limite si elle ne lui raccroche pas au nez. Disha repose son téléphone et se frotte le front avant de se replonger dans son travail. Il s’écoule ainsi une bonne demi-heure avant que la porte s’ouvre, laissant entrevoir la carrure imposante de son ami. “Salut !” Dit-elle en l'accueillant d’un sourire chaleureux. La jeune femme se lève de son siège et fait quelques pas dans la direction de son interlocuteur, qui lui tend un beau bouquet de fleurs, jusqu'ici dissimulé dans son dos. “C’est… pour moi ?” Question un peu idiote mais posée avec une vive émotion dans la voix. La lueur dans ses yeux s’est franchement attendrie lorsqu’ils se posent sur les magnifiques roses, puis leur regard s’accroche à nouveau. “Elles sont magnifiques Aaron, merci beaucoup !” Le rictus à ses lèvres s’est élargi et elle pose le présent avec délicatesse sur son bureau. Elle ne se rappelle pas d'une seule fois où un homme ait pris la peine de lui offrir des fleurs, à part son père lors de grandes occasions, ou à la fin de certains ballets de danse.

Doit-elle prendre Aaron dans ses bras, déposer un baiser sur sa joue ? Le Miller a beau être son ami depuis un petit bout de temps, ils n’ont jamais vraiment eu ce genre d’interaction auparavant. Finalement, Disha reste là où elle est, s’adosse quelques secondes contre le meuble avant de finir par le contourner pour se rassoir. “Je vais bien et toi ?” Elle croise ses mains sur ses cuisses, contenant sa nervosité face à cette question pourtant si banale. Elle ne va pas si bien que ça, mais comme toujours la jolie brune est bien trop fière pour l’avouer au premier venu. “Ma boss est pas là, elle est partie à un rendez-vous médical, je sais pas trop quand elle va revenir.” Ajoute-t-elle l’instant suivant, avant d’offrir un autre sourire à son homologue masculin, lui indiquant le fauteuil qui lui fait face pour qu’il puisse s’assoir, s’il le souhaite. “Mais c’est plutôt calme cette après-midi, tu peux l’attendre ici, si tu veux.” Ce sera peut-être l’occasion de pouvoir discuter un peu tous les deux ; et une bonne distraction pour la tonne de boulot qui l’attend encore.

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o u t f i t · La présence du Miller a quelque chose de réconfortant pour la jeune femme. Elle sait pouvoir compter sur lui dans n’importe quelles circonstances, il l’a prouvé à des nombreuses reprises et ça avant même qu’ils ne soient véritablement amis. Les deux adultes ont passé d'innombrables heures ensemble, que ce soit en cours ou pour réviser ; la sensation était presque un peu étrange, lorsqu’après leur remise de diplôme, ils ont soudainement cessé de se voir pour se concentrer sur leur nouvelle vie. Bien heureusement les deux acolytes ont bien l'intention de remédier à cela en passant un peu de temps ensemble aujourd'hui.

Et le moins que l’on puisse dire, est qu’Aaron a le don de surprendre la jeune femme en lui offrant ce beau bouquet de rose ; la concernée ne s’y attendait pas le moins du monde et décontenancée, ne trouve rien de mieux à faire que de demander si c’est bien pour elle. Et si l’avocat s’en amuse, il ne dit en tout cas rien oralement qui pourrait mettre mal à l’aise Disha ; un vrai gentleman, en somme.

Le Miller affirme ensuite que son amie illumine sa journée et qu’il ne peut décidément plus se passer d’elle ; un sourire narquois se dessine sur les lèvres charnues de Disha à sa réplique et elle prend un air faussement hautain pour lui répondre. “Que veux-tu, je suis irremplaçable !” Elle souffle du nez à sa propre badinerie puis continue sur le même ton lorsque son homologue masculin accepte de rester avec elle, afin d’attendre la patronne de l’agence. “J’ai bien réussi à te supporter plusieurs années à l’université, je devrais survivre le temps qu’elle revienne.” Le jeune homme s’installe donc et la Weaver reprend son travail, même s’il faut bien l’avouer : elle n’est pas très concentrée. Il lui faut s’y prendre à plusieurs reprises avant de lire correctement un mail et a tout autant de difficulté pour y répondre ; il est certain qu’Aaron la trouble un peu.

Ce dernier reprend d’ailleurs la parole, trouvant l’endroit plutôt sympa si on excepte Mme Badgley, dont la réputation n’est déjà plus à faire et ça même s'il ne l'a pas encore rencontré. “Je dois admettre qu’elle a du goût en ce qui concerne la déco.” Se contente de dire l’assistante en immobilier, les pupilles rivées sur son écran d’ordinateur. Finalement, ses yeux s'accrochent à ceux de son interlocuteur tandis qu’il lui pose une nouvelle question. Le rictus inscrit sur le visage de la jeune femme faiblit visiblement à l’évocation de possibles clients relous. “Ça va.” Répond-elle presque trop rapidement, d’un ton un peu moins convaincu. Elle a l’air subitement plus songeuse, comme si elle hésitait à rajouter quelques mots de plus.

Mais après tout, il s’agit d’Aaron et s’il y a bien une personne avec qui elle peut parler de ça -en dehors de sa meilleure amie-, c’est bien lui. “Enfin, il y a eu ce mec, l’autre fois, un vrai con… mais bon il y en a partout, de toute façon.” Dit-elle alors en haussant lentement les épaules, tentant de minimiser une fois de plus la réalité ; son cœur s’emballant lorsqu’elle repense aux grosses mains immondes du pervers sur son corps, son souffle dans son cou ; et le véritable mal être émanant de la Weaver depuis, allant même jusqu’à mettre sa propre santé en danger. “Et toi alors, tu as des dossiers intéressants en cours ? Des potins croustillants à me raconter ?” Demande-t-elle dans la foulée tout en tentant de reprendre contenance, changeant volontairement de sujet.

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o u t f i t · Les boutades vont bon train entre les deux amis ; Disha retrouve momentanément le sourire par la simple présence du Miller. Ça lui fait du bien de le revoir, après ces quelques mois passés sans lui. Il faut dire que les derniers temps ont été un peu compliqués pour la jeune femme ; aussi, même si les plaisanteries de l’avocat arrive à lui tirer un léger rire à chaque fois, son humeur générale en est toujours fortement affectée. Peut-être qu’Aaron le pressent d’ailleurs, puisqu’il réagit au quart de tour lorsque l’assistance immobilier lui parle sommairement d’un client relou. “C’est rien, t’en fais pas…” Lui répond-elle, avant de changer précipitamment de sujet de discussion. Elle veut l’entendre parler de lui pour ne pas avoir à s’étendre sur ce qui l’a récemment tant bouleversé.

Le grand brun explique être sur son premier vrai dossier, rien de bien gai d’après lui. Il rajoute avoir également failli mettre littéralement à terre une avocate. Le jeune homme n’est cependant pas leurré longtemps par son interlocutrice et revient de plus belle sur la confidence de cette dernière. Il veut savoir qui était le type dont elle parlait plus tôt et ce qu’il a fait. Disha soupire, cessant de pianoter sur le clavier de son ordinateur, ses yeux se perdant dans le vide quelques secondes et elle se met à mordiller sa lèvre. Elle hésite à tout lui raconter, toujours par fierté et parce qu'elle est fortement affectée, mais finit par se laisser convaincre. “C’est juste un client à qui je faisais visiter une maison avec sa femme, on devait conclure une vente et il a profité qu’on soit juste tous les deux pour me plaquer contre le frigo de la cuisine et essayer de me toucher… Mais il s’est rien passé, sa femme est arrivée à temps…” Dit-elle, tentant de minimiser les faits dans sa façon de s’exprimer pour ne pas inquiéter davantage son homologue masculin.

Aaron sait par quoi est passée la petite brune il y a quelques années ; et à quel point la malchance semble la frapper lorsque cela concerne les hommes. “Ecoute, j’ai… J’ai pas très envie de parler de ça, c’est encore frais dans ma tête et je voudrais vraiment me changer les idées, arrêter de penser tout le temps à ça…” Arrêter de craindre chaque homme qui s’approche d'un peu trop près, chaque geste qu’elle n’a pas anticipé en premier lieu. “Et si tu me parlais plutôt de cette histoire d’avocate que tu as failli mettre littéralement à terre, hein ? J’aime quand c’est toi qui raconte les histoires.” Ajoute-t-elle en souriant faiblement, une lueur presque suppliante dans le regard.

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o u t f i t · La jeune femme se lance dans le récit de cet évènement qui la trouble encore aujourd’hui, qui met à mal son estime d’elle-même ; un traumatisme qui l’a profondément boulversé, autant physiquement que mentalement. Disha peine à reprendre confiance et si elle va un peu mieux désormais ce n’est que grâce à sa meilleure amie ; par ailleurs la seule qui soit au courant, avec l’avocat ici présent. Aaron ne s’attendait sûrement pas à ce genre de confession en posant sa question, vu qu’il semble être un peu sous le choc ; la Weaver lui demande alors de changer de sujet. Elle voudrait pouvoir penser à autre chose, pour une fois ; elle aimerait que son ami l’y aide, lui aussi, à sortir de cette torpeur dans laquelle elle s’est enfoncée depuis plusieurs semaines. Le grand brun n’insiste pas et elle lui en est reconnaissant ; il se contente de lui rappeler que si elle a besoin de quelqu’un à qui parler ou pour casser la figure du type en question, ou encore juste pour porter plainte, il sera là afin de l’épauler. “Je m’en souviendrais, merci.” Répond-elle d’une voix un peu monotone, se forçant pour lui sourire légèrement pour ne pas l’inquiéter davantage.

L’homme reprend la parole, proposant à son interlocutrice d’aller boire un verre une fois que celle-ci aura terminé son travail ; proposition sûrement précipitée par le sujet de conversation précédent. La sollicitude du Miller touche profondément l’intéressée ; cela se voit que l’homme cherche véritablement à divertir la jeune femme. “Avec plaisir.” Son sourire est un peu plus sincère cette fois, tandis que ses prunelles se posent quelques secondes sur le bouquet de fleurs qu’il vient de lui offrir. Aaron est vraiment très attentionné et galant, c’est adorable de sa part. Elle lui demande ensuite de lui conter sa dernière péripétie sur son lieu de travail et l’homme s’exécute donc, Disha l’écoutant attentivement tandis qu’il s’élance à son tour dans son anecdote.

La façon dont il lui raconte les choses réussit à tirer quelques petits rires de la bouche de la Weaver, qui de son côté tente toujours de rédiger son mail -en vain. “Eh bien, quelle histoire.” Conclue-t-elle lorsqu’il termine. “J’suis sûre que c’est le genre de meuf qui doit péter plus haut que son cul, hein ?” Rajoute l’assistante immobilier en levant les yeux au ciel. “M’enfin, si elle n'a finalement pas tenu rigueur de ton faux-pas et t’a même aidée, c’est le plus important.” Un nouveau rictus fleurit sur ses traits ; puis son téléphone sonne et la concernée  décroche dans la seconde en voyant le nom s’afficher sur son écran. “Oui allô ? Oui…” Dit-elle d’une voix sérieuse et concentrée. Elle hoche de la tête, sourcils froncés. “Bien, d’accord Madame, à demain, aure-...” La jeune femme n’a même pas le temps de terminer sa phrase qu’on lui raccroche au nez.

Un soupire passe la barrière de ses lèvres et ses yeux se reposent automatiquement sur Aaron. “Bon, ma patronne ne reviendra pas aujourd’hui. Ses rendez-vous médicaux se sont éternisés et elle est trop fatiguée, elle est rentrée directement chez elle. Il faudra que tu reviennes du coup, si tu veux la voir… Désolé.” Lui dit-elle, un peu embêtée de l’avoir fait se déplacer un peu pour rien. Cependant, ses traits s’adoucissent l’instant suivant et ce tandis qu’elle commence à s'activer pour trier quelques courriels sur sa messagerie. “Mais le bon côté de tout ça, c’est qu’elle m’a demandé de fermer l’agence et de partir, elle n'a sûrement pas envie de recevoir des appels intempestifs de ma part. Donc si ça te va, je termine d'envoyer quelques mails et on pourra aller boire ce fameux verre tous les deux, d'accord ?”

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o u t f i t · Aaron est un véritable rayon de soleil dans la journée morose de la jeune femme ; elle sait déjà que cette après-midi aurait été difficile à gérer s’il n’avait pas été là. Sûrement aurait-elle broyé du noir en rédigeant ses mails. Mais c’est pourtant un sourire aux lèvres qu’elle arbore actuellement, grâce à son ami. Ce dernier se montre compréhensif et n’insiste pas suite aux précédentes explications de la Weaver ; elle lui en est reconnaissant et l’avocat semble même vouloir lui changer les idées en proposant d’aller prendre un verre après le travail de cette dernière ; elle accepte et toujours en parfait gentleman, le Miller lui demande alors s’il y a un endroit particulier où elle voudrait aller. “Mhhh…” La jolie brune réfléchit quelques secondes, avant qu’un air narquois ne finisse par se dessiner sur son visage. “Il y a bien un endroit oui... Mais je vais garder la surprise jusqu'au bout.” Elle hausse ensuite des épaules avec désinvolture, une lueur de défi dans les yeux.

La conversation se poursuit lorsqu’Aaron se met à conter son anecdote au palais de justice que la jeune femme écoute attentivement, finissant tout de même par faire quelques commentaires une fois le récit terminé. Disha en apprend davantage sur cette fameuse avocate qui a finalement bien aidé son ami. “Je vois.” Finit-elle par dire à la fin des explications du Miller, ne sachant pas quoi dire de plus. De toute façon leur discussion tourne bien court puisque le téléphone de l’assistance immobilier sonne l’instant suivant. La personne à l'autre bout du fil n’est autre que la boss de cette dernière, lui apprenant qu’elle ne repasserait finalement pas à l’agence aujourd’hui. Elle raccroche au nez de la Weaver qui ne peut empêcher son visage de se décomposer l’espace de quelques secondes. Elle reprend tout de même contenance l’instant suivant, expliquant rapidement la situation à l’homme en face d’elle qui se montre une fois de plus arrangeant et très indulgent. Cela lui donnera une occasion de revenir dit-il, avant de faire un commentaire bien senti sur la patronne du lieu où ils se trouvent. “Oui… Mais bon, elle est douée dans ce qu’elle fait, alors ça compense. J’apprends plein de choses avec elle.” Disha se contente de hocher une autre fois des épaules, n’en pensant pas moins, mais n’ayant pas à cœur de trop s’étendre sur ce sujet ; une fois de plus.

La jeune femme s’active ensuite à terminer ses tâches du jour afin de pouvoir partir aux côtés d’Aaron le plus rapidement possible. Ce dernier annonce qu’il va se mettre dans un coin le temps qu’elle finisse et s’exécute ; Disha acquiesçant à ses mots avec un léger rictus. La demi-heure suivante se passe dans un silence presque religieux, les seuls bruits environnant étant essentiellement ceux du clavier sur lequel tape vigoureusement la jolie brune. Une fois son travail terminé, elle lève la tête de son écran, range son bureau à la va vite et il ne leur faut finalement que quelques minutes supplémentaires pour que Disha soit en train de tirer le lourd grillage métallique vers le bas, celui devant la porte d’entrée de l’agence. Le Miller lui tend ensuite son bras qu’elle attrape doucement, un nouveau sourire en coin aux lèvres. “Tu prends vraiment ton rôle de gentleman très à coeur, hein ?” Lui dit-elle, un petit rire s’échappant de sa bouche. Elle redresse ensuite son sac-à-main sur son épaule, le grand brun en profitant pour demander si elle préfère marcher ou prendre un taxi. En temps normal, cela ne l’aurait pas dérangé de se dégourdir un peu les jambes surtout après une journée de travail ; mais la Weaver n’a pratiquement rien dans l’estomac depuis hier et le manque d’énergie se fait alors ressentir jusqu’au plus profond de ses entrailles. Elle relève donc doucement ses prunelles pour les plonger dans les siennes, arborant à nouveau un regard gêné. “Ca te dérange si on prend un taxi ? Je suis un peu fatiguée et l'endroit où j'ai envie qu'on aille, ça n'est pas la porte à côté, je me sens pas de marcher très longtemps…”