(un) Une enfance heureuse mais sous les projecteurs. Très tôt tu as été présenté avec tes sœurs comme la relève de l’entreprise de ton père. A table, vous l’écoutiez faire ses bilans comptables entre le fromage et le dessert. Les histoires du soir étaient bercées par des chiffres et des paroles d’ambitions que votre père avait pour vous. Une enfance heureuse mais vous aviez du mal à trouver votre place au milieu de ce couple de gens d’affaires. Ta mère, une politicienne londonienne, ton père dirigeant de la plus grande entreprise d’informatique. Le couple Murphy était réputé pour faire des merveilles sur tout ce qu’il touchait ou faisait. Des parents populaires et des enfants relayés au stade de futurs dirigeants.(deux)On t’a forcé. A suivre des études dont tu n’avais pas envie. Le cerveau était à priori bien retourné pour tes frangines, mais pas toi. Tu n’avais pas envie de suivre cette voie. Tu aspirais à autre chose. Alors très jeune tu ne travaillais pas. Tu ne foutais rien à l’école, les maitresses disaient que tu t’ennuyais, que tu mettais le bordel en classe. Tout était vrai. Tu as fini en pensionnat pendant 5 ans. Enfant rebelle dès l’âge de 8 ans, tu en as fait voir de toutes les couleurs à tes parents. Pourtant, elle était là. Ta mère. Elle t’envoyait des colis avec des bonbons, elle t’envoyait souvent des lettres de soutien. Elle te comprenait un peu et au fond, tu es persuadé qu’elle aurait voulu autre chose pour vous trois, pour toi.  (trois) Une fois revenu, tu as fini l’école « normalement », arrêtant le temps d’un instant les bêtises. Puis tu es rentré en fac d’économie, tes stages étaient dans l’entreprise familiale pour que le personnel commence à te connaître. Tu n’en avais rien à faire, mais tu faisais bonne figure. C’était comme ça qu’il fallait faire.(quatre)A tes vingt ans tu t’es retrouvé hors de chez toi. Chassé par tes parents, par ta mère. Chassé mais avec un compte en banque bien plein. Tu as fuis le plus loin possible pour prendre des vacances et réfléchir à ta situation. Tu as pris un billet aller-retour pour Brisbane, Australie. Et puis tu n’es jamais reparti. (cinq)La fête est devenu ton quotidien. Profitez de ta jeunesse, t’amuser. Tu t’es mis à déconner pour finalement que tout ceci devienne ton train de vie. Un train de vie qui en dégoûte beaucoup, que certains te voudrait voir arrêter. Mais tu n’as pas envie de te prendre au sérieux. On t’a privé une partie de ton enfance, de ta liberté. Loin de tout, tu peux enfin vivre ta vie comme on l’entend.  (six)Pourtant aujourd’hui, tu es dirigeant dans une filiale de ton père. Comment est-ce possible ? Ta mère est tombée malade quelques années après ton départ. Elle ne s’est jamais remise de ne pas avoir de nouvelles.  Les remords t’ont poussé à accepter ce poste, mais tu ne fiches rien de rien. Tu t’y connais à peine à vrai dire. Tu es là parce que tu as un nom, celui dont tu as hérité, mais certainement pas pour tes compétences.(sept) Tu préférais vivre de ta passion. La photographie. Tu as découvert cet art à Londres, lors d’une exposition à laquelle participait toute la famille. Des portraits de femmes et d’hommes merveilleux où les expressions du visage dissimulés tellement d’émotions. Ca t’a chamboulé. Tu as voulu en faire une passion, alors tu as entrepris de prendre des cours de photographie que tu te payais avec ton argent. Pendant longtemps tu l’as caché à tes parents jusqu’à ce que tu leur montre. Ca ne les a pas chamboulé, eux. Une passion futile pour ton père, sans intérêt pour tes sœurs, pas un métier d’avenir pour ta mère. Tu n’as jamais compris leur réaction. A ton arrivée à Brisbane, tu as entrepris de reprendre ce que tu avais dû arrêter à Londres. Une vraie passion qui t’anime entre deux réunions. Tu photographies les personnes, pour essayer de transmettre leur émotion. Des femmes et des hommes, peu importe ce qu’ils sont. Tu es fasciné par ce qu’une personne peut raconter quand elle pose. Tout est dans le regard, la position du corps, le visage …. (huit) Aujourd’hui, tu es heureux avec la vie que tu mènes. Il te manquerait peut-être une femme, mais ce n’est pas dans tes priorités. Tu admets que pour plier les draps, c’est quand même plus facile à deux. Mais une femme t’a déjà fait trop de mal, tu préfères de loin en rester là. Tu ne saurais pas donner de l’amour à une personne. Jamais.