Et si on remontait un peu dans le temps ? Pas beaucoup. Quelques semaines. Quelques mois.

Rebekah est là. Dans cet aéroport. Dans la partie duty free. Parce que ... parce qu'elle a quelques escales. Un vol direct Suède vers l'Australie, c'est n'existe pas. Et elle n'a pas forcément le temps à chaque fois de sortir de l'aéroport pour faire un peu de tourisme. Enfin si, y'a eu une escale de deux jours. A cause d'une tempête de sable. Où là effectivement elle a dû trouver un hôtel un peu en urgence et ça n'a pas été marrant. M'enfin. Son calvaire est bientôt fini. D'ici à quelques heures, ça sera la terre promise. Façon de parler. C'est un grand changement pour la suédoise. Elle a arrêté la fac. A la place, elle a beaucoup travaillé pour mettre de l'argent de côté. Et pour permettre, justement, ce voyage. Permettre de pouvoir s'installer également. Elle sait que ça va être compliqué. Trouver un logement. Trouver un job. Faire en sorte de rencontrer les autres membres de sa famille qu'elle ne connaît pas encore. Elle a eu l'occasion de rencontrer son père. Sa tante. Mais il lui reste encore tellement de monde à rencontrer ! Est-ce que ça lui fait peur ? Pas du tout. Est-ce qu'elle craint de ne pas être acceptée ? Non. La seule personne qui peut lui faire peur, c'est ... c'est Esma. La femme de son père. Elle a pris un sacré coup au moral quand Rebekah a débarqué en juin dernier. Ca va pas être facile. Elle sait pas si ... si ça va bien se passer entre elles. Mais il faudra bien. Enfin.

Elle relève le nez tandis qu'on appelle les passagers à destination de Brisbane. C'est la dernière correspondance. Le dernier vol. Elle a fait le plus gros. Elle a hâte de se poser mine de rien. Elle récupère son sac à main et son sac à dos. Le reste, c'est en soute. Mais ça, elle pouvait le prendre avec elle. "Bonjour." Elle présente sa pièce d'identité. Enfin, son passeport en l'occurrence. Son billet. Et on la laisse passer. Elle emprunte la passerelle et elle finit par rentrer dans l'avion après quelques minutes. "6F..." Elle s'avance dans l'allée jusqu'à trouver son siège. Côté hublot. Elle met son sac à dos dans le casier au dessus de sa tête et elle finit par s'installer. Elle a hâte. Elle a hâte d'arriver. Elle a hâte que ce vol se termine et de commencer sa nouvelle vie. C'est peut-être une grosse erreur. Peut-être qu'il n'en ressortira rien de bon et que ... qu'elle n'aurait jamais dû partir. Mais quand elle a dit à Alarik qu'elle comptait rester plus que quelques semaines, il semblait si heureux. Et elle a pas l'impression qu'il feintait. En tout cas, elle en aura vite ... elle en aura vite le coeur net comme on le dit si bien.

Elle tourne la tête quand quelqu'un s'installe à ses côtés. Ca l'aurait étonnée qu'elle soit toute seule. Elle l'a pas été jusqu'à présent. "Bonjour." C'est la moindre des choses. De le saluer. Histoire de lui montrer qu'elle a bien vu qu'il était là. Il a de beaux yeux en tout cas et clairement au goût de la demoiselle. Même si elle est pas vraiment là pour ça. Elle a des yeux pour voir après tout. Elle a bien le droit, non ?

Il est beau garçon mine de rien. Et ça le change de son précédent vol. Où elle était à côté d'un vilain garnement qui n'arrêtait pas de bouger et surtout, qui était assez pénible. Elle apprécie les enfants Rebekah. Du moins, elle n'a rien contre. Mais ceux qui foutent le bordel et qui sont pénibles ... ouais. Elle préfère les éviter, c'est sûr.

En tout cas, il la salue avec un sourire. "J'irais encore mieux une fois que je serais arrivée." Elle a un hochement de la tête. "C'était un long voyage et j'ai hâte de me poser enfin !" Et elle ne reprendra pas l'avion de sitôt, ça, c'est sûr. Oh, bien sûr, sa mère était un peu triste de la voir partir. Et elle a eu un peu du mal à se dire que sa fille partait vivre sa vie sur un autre continent. Qu'elle partait à l'autre bout de la terre rejoindre un homme qu'elle ne connaissait pas. Et oui, Rebekah ne connaît pas bien son père. Elle a appris à le connaître lors de son précédent voyage. Mais elle sait qu'elle a encore beaucoup de choses à apprendre sur lui. Elle doit rencontrer Nils. Mais également Avery. Elle doit passer du temps avec son père. Avec sa tante. Et elle n'en oublie pas Jo également. Et y'a aussi Esma, sa belle-mère. Enfin, faudrait déjà qu'elles se rencontrent. Parce qu'elles se sont soigneusement évitées lors de son précédent passage. Alarik lui a dit qu'elle avait besoin de temps. Donc, elle n'a pas vraiment cherché à ... Et bien, elle n'a pas cherché à forcer les choses. Sa priorité, ça reste quand même son père après tout. "Et vous ?"

On leur demande de prendre place. De s'installer. De mettre les ceintures également et d'éteindre les appareils électroniques. La première fois qu'elle est partie, elle s'est fait avoir. Elle comptait mettre ses écouteurs sans fils en Bluetooth avec son téléphone. Pour écouter de la musique. Sauf qu'elle n'avait pas le droit d'activer le Bluetooth. Là, elle s'est contentée d'un bon vieux appareil MP3 avec des écouteurs. Avec fil en cas de besoin. Rebekah se charge donc d'attacher sa ceinture, comme demandé. Il en a fait de même. Et sa main a frôlé celle de la jeune femme. Il s'excuse et il fait rire un peu Rebekah. "Vous savez, vous pouvez toujours appeler les stewards et me payer un jus de fruit alors !" Elle sait que ça va pas être possible tout de suite. Pourquoi ? Parce qu'il faudra attendre qu'ils soient en vol. Qu'ils aient pris leur vitesse de croisière. A ce moment, ils pourront se détacher. Se balader dans l'avion au besoin. Et demander à boire. Ou à manger. "Votre terminus, c'est Brisbane également ?" D'ailleurs, elle en profite pour attraper son téléphone. Avant de le mettre en mode avion, elle envoie un petit sms à son père pour lui dire qu'elle est installée et qu'elle le prévient dès que le vol a atterri.

Elle a envie de causer. Un peu. Peut-être parce qu'elle est proche de la fin. Enfin, de la fin du voyage surtout. Elle a tellement hâte de poser ses valises ! Il est prévu qu'elle dorme les deux prochains jours chez Adela, sa tante. Elle aurait pu aller chez son père, c'est vrai, mais elle n'a pas encore rencontré Esma. Et elle ne veut pas s'imposer. Non. Donc, chez sa tante. Elle avait trouvé un appartement en colocation. Avant son départ. Sauf que le gars qui propose était pas dispo avant deux jours. D'où le fait qu'elle emménage pas tout de suite. Enfin, avant d'emménager, elle voulait quand même faire une visite. Parce qu'une visite virtuelle, c'est pas suffisant. Et si ça lui convient, elle aura une chambre dans la coloc. Et elle ose espérer que ça va le faire. Parce que débarquer chez Alarik, ok, mais Esma risque de pas ... apprécier. Elle ne pense pas en tout cas. Mais passons.

Oui, elle a envie de papoter. Et puis, le gars à côté d'elle a l'air sympa. Alors, pourquoi pas ? "J'suis dans le même état que vous." Elle a un hochement de la tête. "Pour savoir quel jour il est, faut que j'regarde mon téléphone." Heureusement qu'il est à jour. "C'est ma cinquième et dernière correspondance. Y'en a eu où on est restés bloqués deux jours à cause d'une tempête de sable." Elle aurait dû arriver plus tôt. Et c'est à cause de ça, d'ailleurs, qu'elle a pas pu honorer la première visite de l'appartement. S'il a hâte de gagner son lit, c'est pas le cas de Rebekah. Elle ne connaît pas vraiment l'Australie. Elle y est déjà venue, c'est vrai. Mais c'est une toute nouvelle vie qui s'offre à elle. Ca lui fait peur. Mais elle quand même décidé de sauter le pas.

Il a frôlé sa main en voulant s'attacher. Rien de bien grave. Et il lui offrira un petit quelque chose. Un verre. Dès qu'il en aura l'occasion. Et Rebekah se contente de répondre à son sourire ... par un autre sourire à dire vrai. Sa destination finale ? Comme elle. Brisbane. Il vient voir sa famille. "Un peu comme moi. J'ai plaqué ma Suède natale ... Pour venir rencontrer les membres de ma famille que je ne connais pas encore." Elle a un hochement de la tête. "J'dois avouer que c'est un grand changement et que ça me fait un peu peur." Et c'est normal. Et si, au final, elle n'arrivait pas à s'y faire ? Si ... la Suède lui manquait trop ? Ou si son père décidait qu'au final, il voulait pas être père et qu'il ne voulait pas l'avoir dans le décor ? Il n'a pas arrêté de lui dire, c'est vrai, qu'il voulait être là. Mais s'il avait changé d'avis ? Ou s'il changeait d'avis en cours de route ? Est-ce que c'était pas une erreur de quitter la Suède ? Elle ne sait pas.

Le commandant de bord commence à faire son annonce après que les stewarts aient fermé les portes de l'avion. Et comme à chaque fois, les consignes de sécurité. Elle se penche vers son voisin. "J'en ai franchement marre de les entendre, encore et encore." Elle soupire. Mais ils ont pas trop le choix après tout.