En ce moment, tout était trop. Trop d'informations à prendre en considération, trop d'annonces à recevoir et à faire, trop de de mauvaises nouvelles à encaisser, trop de visages à supporter. C'était une montagne de choses qui arrivaient dans ta vie, et tu commençais à ne plus savoir comment les gérer. Tu as pourtant toujours été celui sur qui on peut compter. Celui qui a la solution à tout, celui qui sait gérer les problèmes, celui qui aime prendre soin des autres, celui qui sait écouter et agir. Ayant grandi dans une famille soudée, tu as eu la chance de pouvoir avoir la famille Winchester comme boussole de vie. Sans eux, ta trajectoire n'aurait pas été la même, ta personnalité non plus. C'est par l'amour que tu as reçu que tu sais désormais comment le rendre aux autres. C'est parce qu'on a cru en toi et qu'on ta donné les capacités d'avoir des responsabilités que tu sais désormais comment traiter une situation. De manière réfléchie, jamais dans la précipitation, toujours dans l'analyse de celle-ci. Être un bon adulte a finalement toujours été la conséquence logique de ton éducation. Être un bon fils, un bon frère, un bon cousin et un bon ami. Il n'y a qu'en étant un fiancé que tu n'as pas su donner le meilleur de toi. Mais sinon, en toute circonstance, on peut compter sur toi.

Tu as toujours aimé ça, d'ailleurs, être l'épaule sur laquelle ton entourage pouvait se poser. C'est une fierté de pouvoir être une personne digne de confiance et qu'on puisse se tourner vers toi lors de moments un peu plus difficiles. Sauf que là, il y a trop à supporter. Comment continuer à vivre ta vie alors que ton meilleur ami ne sera jamais plus le même ? Comment l'annoncer à son entourage pour être le plus informatif et rassurant possible ? Comment l'annoncer à ta propre famille, pour qu'elle sache ce que tu traverses, sans avoir l'impression de demander la charité ? Réunir le groupe, aussi, pour leur annoncer la nouvelle, essayer de garder la tête haute et de ne pas craquer. reprendre les cours car la rentrée universitaire commence, et rester le meilleur enseignant possible, réponde aux questions, recommençant le tourbillon des évaluations-projets à suivre-mémoires à étudier. La vie continue, et tu as l'impression de n'être que spectateur de celle-ci. De vivre par automatisme.

Delilah a dû le sentir. Elle a toujours su lire en tout, même quand toi tu ne le pouvais pas. Pourtant passé maître dans l'art de l'auto-analyse, il faut bien se rendre à l'évidence que tu tires dangereusement sur la corde. Le surplus d'informations commence à faire bouillonner ton cerveau, et sans ce week-end loin de Brisbane, peut-être aurait-il implosé. Heureusement, ta cousine a eu la merveilleuse idée de te sortir de ton décor d'infortune, celui où trop d'enjeux se jouent sans que tu puisses les contrôles. "Est-ce qu'on dépose nos affaires dans nos chambres et on se retrouve ici pour discuter du programme ?" Arrivés à l'hôtel de la Moreton Island, prêt à profiter autant que possible de ce week-end. L'hôtel est franchement touristique, tu le sens dans l'accueil et dans le décor. Peut-être que c'est exactement ce qu'il te fallait, jouer les touristes pendant deux jours, et ne plus être toi ? "Je propose une excursion dans les veilles épaves ou une visite du phare. Oh, j'ai aussi vu qu'ils proposaient une excursion nocturne en kayak." Plaquette en main, tu la pointes du doigt à ta cousine, attendant sa réponse. Retenant un peu ton enthousiasme, tu avoues que ces diverses activités te redonnent un peu de baume au coeur. La présence de Delilah aussi. Surtout ça. Cela te réchauffe le coeur, de pouvoir ressentir un peu d'enthousiasme. Est-ce que malgré la culpabilité qui fait désormais corps avec toi et qui n'est pas prête à s'en aller, tu saurais encore ressentir un peu de joie ?