@Livia Castillo & @Solana Castillo

Ses pas l'ont naturellement mené vers l'appartement de sa cousine, sans que Livia n'ait eu besoin de se concentrer sur le trajet qu'elle connaît par cœur. Depuis qu'elle est adolescente et à chaque fois que ses pensées se sont fait un peu trop lourdes, la brune a pris l'habitude de trouver refuge chez Sol, qu'elle estime être la seule personne de sa famille à qui elle peut se confier sans crainte d'être jugée ou de mettre à mal l'ensemble de l'équilibre familial déjà si fragile. Livia ne compte plus le nombre de fois où elle s'est retrouvée devant la porte de la brune, les yeux un peu rouges et le nez qui coule, le cœur aussi lourd que le sac qu'elle tenait aujourd'hui à l'épaule. Elle ne sait jamais pour combien de temps elle reste, Livia. Parfois c'est l'histoire d'une nuit, parfois plusieurs jours : son record, c'est probablement les deux semaines qu'elle a passé chez Sol lorsque Moisés est revenu totalement changé de son camp de vacances, et que la brune a eu l'impression de voir son monde instable s'écrouler. Solana ne l'oblige jamais à parler, ne l'oblige jamais à partir, ne l'oblige jamais à rien, d'ailleurs. Parfois, Livia se sent coupable de lui imposer sa présence mais, il lui suffit de rencontrer le sourire réconfortant de sa cousine, et elle comprend immédiatement que cette dernière sera toujours prête à l'accueillir les bras ouverts. La réciproque est, bien sûr, totalement vraie : la brune n'a jamais eu l'occasion de lui apporter son soutien à la hauteur de tout ce que Sol a déjà eu l'opportunité de faire pour elle, mais elle se plaît à penser que sa cousine sait pertinemment que Livia est là, en cas de besoin. Bien sûr, cette dernière espère toujours que sa vie sera assez douce pour ne pas nécessiter l'aide de quiconque.

Livia sonne à la porte, attendant patiemment que Solana vienne lui ouvrir. Elle ne sait même pas si elle est chez elle, n'ayant pas pensé à la prévenir de son arrivée. Là où d'autres pourraient y voir un manque de politesse, les deux cousines sont suffisamment proches pour ne plus s'en offusquer : c'est comme ça qu'elles fonctionnent, voilà tout. « Hey, ça me fait plaisir de te voir ! » Elle laisse échapper au moment même où ses yeux s'accrochent à la silhouette de Sol, l'enlaçant pour venir la serrer contre elle. Livia la suit sans un mot, profitant de l'ambiance réconfortante qui se dégage de l'endroit, comme à chaque fois. « Je vais prendre le vin, le pad thaï et les gâteaux. » Elle a le regard implorant, et sa réponse est sans équivoque quant à la gravité des problèmes qui la mènent jusque chez Solana ce soir-là. Bon, c'est vrai qu'au fond, Livia exagère probablement quelque peu : il y a pire dans la vie, que de rompre définitivement avec son ex, surtout si cela signifie retrouver sa dignité et son indépendance émotionnelle. Et puis, à bien y réfléchir, le baptême à venir de Nieve qui l'angoisse tant est censé être un événement joyeux, une occasion rêvée de réunir les Castillo et d'enterrer définitivement la hache de guerre avec son père. Mais elle n'y peut rien, Livia. Toutes ses pensées terrifiantes s'entremêlent dans son esprit jusqu'à former un brouillard épais qu'elle ne parviendra pas, elle le sait, à dissiper sans aide extérieure. « C'était quoi ? J'ai terminé Too Hot to Handle le week-end dernier et même ça, j'ai cru que ça allait me faire pleurer. » Signe ultime, s'il en fallait un, que le moral de Livia n'était pas au beau fixe, ces derniers jours. Elle pose son sac à côté du canapé avant de s'y laisser tomber mollement, laissant échapper un soupir dramatique. « Merci, Sol. Je suis désolée si je te dérange, promis je peux partir avant minuit comme Cendrillon. » Elle laisse échapper un rire sans joie, farfouillant dans son sac à la recherche de paquets de bonbons qu'elle a acheté sur le chemin. « Je t'ai apporté ça, pour rendre hommage à notre maturité. Et puis, ça fait un super snack, devant une télé-réalité. » Livia sourit, reportant son attention toute entière sur Solana, cherchant à saisir sur les traits de son visage si tout va bien, pour elle. Depuis sa rupture, la brune s'inquiète, mais n'a jamais réellement osé venir l'embêter sur le sujet, partant du principe que sa cousine viendra se confier à elle quand elle en ressentira le besoin. « Et toi, comment tu vas ? T'es toujours aussi belle, Sol. » Elle ajoute sincèrement, toujours aussi honnête avec les personnes à qui elle tient.

@Livia Castillo & @Solana Castillo

tw : mention de décès

Livia ne se fait pas prier pour faire comme chez elle. Après tout, elles ont dépassé le stade des politesses depuis bien longtemps, et l'animatrice s'attend à ce que sa cousine agisse de la même manière lorsque c'est elle qui la reçoit. La brune n'attend pas une minute de plus pour laisser sa lassitude s'exprimer, observant Solana qui s'est assisse à l'écart, consciente de la tornade en laquelle Livia pouvait parfois se transformer lorsque son esprit se faisait trop lourd. « Me juge pas, Sol. Je t'avais prévenu, que ça allait pas fort. » Un rire sincère s'échappe néanmoins de ses lèvres. Aujourd'hui et comme à chaque fois, sa cousine sait viser juste, pour lui remonter le moral sans même le vouloir. Elle n'a pas besoin de faire beaucoup d'efforts : elle connait suffisamment la brune pour savoir que, parfois, elle a juste besoin d'entendre quelqu'un tourner en dérision ce qui la préoccupe tant. « Je peux dormir ici ? Je t'avoue que j'ai pas tellement envie de me retrouver toute seule, ce soir. » Elle n'est jamais vraiment seule, bien sûr : il y a Puchi mais, malheureusement pour Livia, il n'est pas encore doué du don de la parole, bien qu'il soit tout à fait capable de se faire comprendre la plupart du temps. Ce n'est pas pour rien, si elle a sauté sur l'occasion de dépanner un de ses collègues qui était en recherche d'appartement : au fond, c'était une forme d'entraide réciproque, sans même que Kaleb ne le sache. « Dis pas de bêtises, Sol. T'es à peine plus âgée que moi. » Elle n'insiste pas, cependant, car elle voit bien que sa cousine tente tant bien que mal de donner le change quant à son propre ressenti depuis le deuil qu'elle traverse et sa rupture qui est venue s'ajouter au tas d'épreuves qu'elle tentait déjà de surmonter du mieux qu'elle le pouvait. Livia est inquiète, bien sûr. Mais, surtout, elle se sent démunie. « T'es forte, vraiment. Je t'admire, tu sais. » Elle lui adresse un léger sourire, espérant réussir à apaiser quelque peu Solana ou, du moins, lui faire comprendre qu'elle est là pour elle, elle aussi. « Y a rien de mal à pleurer, cela dit. Mais interdiction de le faire toute seule : tu m'appelles et on regarde Too Hot to Handle ensemble. » Quel super programme en perspective.

Comme souvent avec Solana et sa tendance à avoir le cœur sur la main, la discussion dérive rapidement sur Livia et sur ce qui la pousse probablement à venir se réfugier chez elle, comme toujours lorsque l'orage gronde. Elle soupire doucement, hésite, ne sait pas très bien quels mots utiliser. Comment exprimer correctement à quel point elle se sent trahie et définitivement stupide ? « Oh, tu sais, toujours la même chose. » Elle soupire de plus belle, et son regard s'accroche au liquide rougeâtre qui tournoie dans son verre, venant s'écraser contre les parois dans une danse quasi hypnotique. Elle a beau accorder une confiance aveugle à sa cousine, c'est toujours compliqué, de lui confier les ressentiments qui l'animent vis à vis des Castillo, précisément car elle porte leur nom de famille et qu'elle y a pleinement sa place, dans ce cercle. Et puis, Sol vient tout juste de devenir orpheline de père et Livia ne veut pas être égoïste et lui manquer de respect au point de se plaindre de Juan qui, lui, est par chance bien vivant. « C'est fini, avec Liam. Bon, on s'était jamais vraiment remis en couple mais, tu sais, l'espoir était là. » Sa voix ne tremble pas, mais les gorgées de vin qu'elle avale comme pour se donner contenance ne trompent pas. La blessure est tue, dissimulée, mais bien présente. A vif, douloureuse, omniprésente. C'est la première fois qu'elle l'exprime à voix haute, cette espérance dont elle ne s'était pas méfiée et qui avait doucement fini par se creuser une place profonde quelque part au fond de son cœur et dans un coin caché de son cerveau. Oui, et même s'il lui était difficile de se l'avouer, Livia avait vraiment espéré pouvoir réussir à changer le brun, être en mesure de devenir si importante à ses yeux qu'il n'aurait eu d'autres choix que de tomber amoureux d'elle à son tour. C'était égoïste et naïf, Livia en avait conscience, désormais ; mais c'était pur, et jamais la brune n'avait cherché à agir autrement que dans une transparence et une honnêteté des plus totales. « Je crois qu'il a rencontré quelqu'un d'autre, mais il veut pas assumer. » La brune hausse vaguement les épaules tandis qu'elle s'empare d'un bonbon qu'elle mâchouille d'un air absent, visiblement plongée dans des pensées hors du temps. Un endroit très loin de Solana et de son appartement, quelque part entre les remords et les regrets, accessible uniquement si l'on présente un cœur lourd et un cerveau embrumé par les "et si ?". Mais c'est fini, les suppositions, Livia. Pour la première fois de sa vie, la brune se demande si, au fond, rester dans le flou n'est pas préférable à la peine qu'elle ressent désormais. « Je m'en remettrais, mais si tu savais comme je lui en veux, Sol. Pourquoi il m'a pas dit que c'était moi le problème, plutôt que de faire comme s'il était incapable d'aimer quelqu'un pour de vrai ? » C'est une question rhétorique, bien sûr. Sa cousine, comme tous les autres, ne détient pas les clés de la psyché de Liam. Pour être tout à fait honnête, Livia n'est même pas certaine que lui se comprenne totalement, pour commencer. Il faut faire avec, et ça ira – bien sûr, que ça ira. Mais elle a les yeux brillants, la brune. Et le ton grave qu'on ne réserve qu'aux déceptions les plus douloureuses.

@Livia Castillo & @Solana Castillo

Livia n'insiste jamais, quand elle sent que sa cousine élude le sujet de ses propres ressentis. Elle connaît la pudeur de Sol, sait reconnaître les signes d'une conversation aux prémices maladroits. Si la brune se taisait, pourtant, il ne faisait nul doute que son inquiétude n'avait pas perdu de sa voix, elle. Livia se contentait de la dissimuler dans un coin de son esprit, attendant le moment propice où elle sentirait Sol dans le besoin de s'ouvrir sur ce qu'elle traversait. C'était comme ça que les choses se déroulaient depuis des générations, parmi les Castillo. On ne tirait jamais un trait sur les problèmes des siens, peu importe à quel point ils tentaient de les conserver loin de toute portée familiale pour n'inquiéter personne. « T'as pas intérêt à me juger de toute façon, sinon je le dis à Mo et sa colère s'abattra sur toi. » Elle rigole pour la forme, Livia, parce qu'elle sait pertinemment que ses propos ne sont pas crédibles une seule seconde. La brune a beau souvent comparer Moisés à une force tranquille, ou répondant parfaitement à l'adage "Méfiez-vous de l'eau qui dort", il n'en demeure pas moins qu'elle le sait capable de sortir les griffes pour protéger les membres de sa famille, et leur cousine en tête. « Même si j'aimerais beaucoup passer la semaine à dormir ici, je vais devoir rentrer pour éviter à mes colocataires de s'entretuer pendant mon absence. » Là encore, elle exagère, Livia. Il est vrai que ce beau petit monde n'habite pas ensemble depuis très longtemps et qu'ils apprennent encore les limites des uns, les points communs des autres. Ils n'ont pas tout à fait leurs marques mais, une chose est sûre, ils se complètent bien mieux que la jeune femme n'aurait jamais pu l'espérer.

Elle s'enfonce un peu plus loin dans le canapé de Solana, boit une nouvelle gorgée de vin accompagnée de quelques coups de fourchette de pad thai. Elle se sent déjà plus légère, après avoir confié tout ce qu'elle gardait sur le cœur depuis tant de temps. Comme elle s'en doutait, les paroles remplies de sagesse de sa cousine, à l'œil affuté de ceux qui ont un regard extérieur sur les choses, lui remonte le moral sans qu'elle n'ait à produire aucun effort supplémentaire. Livia a subitement envie de la serrer fort dans ses bras, mais elle se retient in extremis. « Je sais que tu as raison, Sol. En tout cas, si c'est toi qui étais venue me parler de cette histoire, je t'aurais répondu la même chose. Et je l'aurais pensé pour de vrai. » Par réflexe, et sans doute par besoin de réconfort, la main de Livia s'est doucement resserrée autour de celle de sa cousine. Elle pose sa tête sur son épaule, ferme les yeux quelques secondes pour profiter du calme rassurant que l'appartement de la brune lui apporte. Elle a toujours apprécié passer du temps avec Solana : quand elle était plus jeune et que les disputes avec son père se faisaient plus nombreuses, Livia ne comptait plus le nombre de fois où elle s'était réfugiée à ses côtés, déterminée à refaire le monde pendant des heures. Ce soir ne faisait pas exception : la brune se laissait envelopper toute entière par le cocon que représentait le salon de Sol, s'accrochait à la sensation de sa main dans la sienne. Elle ferme les yeux et, pendant quelques secondes, inspire et expire à un rythme régulier. « Le truc c'est que, plus j'y pense, plus je me dis que j'ai été un peu naïve, dans cette histoire. Et ça m'agace, parce que j'ai pas envie qu'il puisse me faire penser que c'est moi, le problème, justement. » Elle soupire, passe une main sur son visage, consciente que ses paroles n'ont peut-être pas beaucoup de sens. La rupture définitive est encore fraîche, et la brune n'est pas tout à fait persuadée d'avoir réussi à mettre de l'ordre dans l'ensemble des sensations qui agitent son esprit, ni dans les sentiments contradictoires qui percent son cœur ces derniers jours. « T'en penses quoi, Solana ? Tu crois que tout le monde est destiné à trouver quelqu'un jour ? » L'animatrice marque une pause, tandis qu'elle détache son regard de son interlocutrice pour venir le reporter sur une Brisbane étendue qui s'agite à travers la fenêtre du salon dans lequel elles se trouvent toutes les deux, maintenant. « Moi, quand j'y réfléchis, je me dis que je suis peut-être pas faite pour ça, finalement. » C'était un constat lourd de sens, et Livia le laisse pourtant échapper comme si elle ne faisait qu'évoquer le soleil haut dans le ciel ou le prix de l'essence. Peut-être parce que l'animatrice ne croyait pas vraiment en ce qu'elle pouvait bien sous-entendre, en confiant ce genre de pensées à Solana. Au fond, c'était peut-être ce qu'elle aurait aimé réussir à croire. Une résignation au goût de légèreté retrouvée, parce que tout était bien plus simple lorsque l'on arrêtait de courir après ce que l'on pensait être hors de portée.