Did I break your heart?
Did I waste your time?
I tried to be there for you
Then you tried to break mine
w/ @Nate Russo

But it will cost me. Réminiscence d'une conversation qu'elle ne cesse de retourner dans son esprit, ce qu'elle a laissé fuiter, ce qu'elle a osé insinuer. Le vin joue aisément sur ses insécurités et tout ce qu'elle fuit au lieu de l'affronter. Les souvenirs sont si frais et pour cause, ils datent seulement de quelques minutes. Ses mains encadrent son visage d'embarras et son sac à l'épaule la rappelle à l'ordre brusquement. Effie ne boit pas ou très rarement et il faut croire qu'il y a une raison à cela. Nate a raison, elle ne tient pas l'alcool. Elle ainsi que tout son entourage sait ça. À part eux. Ces hommes et femmes en costumes qu'elle souhaite un jour à minima contenter - à défaut d'un jour être respecté. C'est mal parti cela dit. Elle est incapable de récupérer quelques parts d'un seul actionnaire. This one only wish to negotiate with you, can you handle it? Of course. C'était avant de se rendre compte que cette mission lui avait été confiée pour les mauvaises raisons, que celui-ci n'était pas n'importe qui. Dire qu'elle avait accepté si confiante.. s'ils cherchent à la décrédibiliser, c'est leur chance ! How is it going with- It's going. Him being in prison does complicate things a bit you understand. We do and that's precisely why it needs to be settled swiftly. Elle se rappelle avoir sourit et puis, quand ils ont proposé ce verre après la réunion, elle a acquiescer sans songer une seule seconde au fait qu'elle était attendue ailleurs..
Elle regrette, bien évidemment. Elle regrette d'avoir accepté même s'ils se sont vite dispersés. Elle regrette les messages qu'elle lui a envoyé sous l'influence des pensées qui l'ont alors submergées. Plus que jamais sa mère lui manque. Elle aurait trouvé une solution, elle aurait géré cette situation avec brio. Effie se sent soudainement si petite.. si démunie. Si idiote aussi. A kid, all over again.. stepping in boots too big for her.
Elle a froid et chaud à la fois. Froid aux bras qu'elle frictionne tant bien que mal. Chaud aux joues pourprée par son état. Sur l'écran lumineux deux points clignotent et l'un se rapproche. C'est comme ça qu'elle sait qu'il n'est pas loin, que les minutes sont comptées. Elle a hâte de rentrer mais son estomac se tord à l'idée de l'affronter. Son sauveur, prince charmant qu'elle a arraché à sa cour. Et puis elle entend d'abord le moteur avant de le voir. Elle s'en veut tellement de l'avoir inquiété pour si peu, elle est rongée par la culpabilité qu'elle en a presque la nausée. « I'm never drinking again. » qu'elle annonce en entrouvrant la portière pour s'installer sur le siège passager de sa Maserati, davantage pour se rassurer mais aussi, s'excuser.

And you will never see my side
And I will always think I'm right
But I always regret the night
I told you I would hate you 'til forever
w/ @Effie Clarke

Tout cela ne lui ressemble pas. Ni à elle, encore moins à lui. Nate ne cherche jamais vraiment à savoir ce qu’elle fait, où elle est. En réalité, il lui accorde une confiance aveugle et espère que cela soit réciproque. Mais depuis quelques semaines, tout est différent. Les non-dits pourrissent dans les esprits et la méfiance empoisonne tout le reste. Ces ratés ne leur ressemblent pas. Oublier, reporter, faire comme si de rien était. Il s’inquiète, bien plus qu’il ne lui en veut, Nate. Car tout cela semble glisser entre leurs doigts. Une relation presque parfaite qui s’émiette sous le poids des secrets. Ils en viennent à oublier qui ils sont vraiment et tout ce qu’ils ont su traverser jusque là. La distance, l’échec, la réussite. Une célébrité naissante et une vie sous la lentille des paparazzi. Elle est son havre de paix mais pour ce soir, l’Eden s’embrase. Et Nate accourt pathétiquement, dans l’idée d’éteindre les flammes.
Le souvenir des messages est encore frais, pourtant. Le dédain, et ce qu’on pourrait même qualifier comme un certain mépris. Russo n’accorde que peu d’importance aux mots, au final, marqué par l’éthanol et le comportement divergent qu’un verre de trop provoque. La sportive ronronne dans les rues de Brisbane et la distance s’amenuise entre les deux corps, quand elle semble pourtant se creuser entre deux âmes. Il la voit alors, il silhouette trop pâle sur le côté, et il s’arrête à sa hauteur. Il a le cœur qui gonfle, Nate, et le vertige entre ses deux tempes. Le sang qui pulse et une colère étouffée qui bouillonne dans la veine. Il lui en veut - au moins autant qu’il s’en veut. C’est un fardeau partagé, mais pas pour les mêmes raisons. Il ne sait rien de ses motivations à elle, et inversement, ce qui laisse la place à mille suppositions plus douloureuses les unes que les autres. Il la laisse prendre place sur le siège passager. Il ne répond rien et n’a rien d’autre à offrir qu’un silence pesant. Ses mâchoires se serrent et il se réengage sur la route qui les mènera chez eux. Un feu rouge, puis deux, les mètres défilent et le silence devient de plus en plus difficile à supporter. Puis, il cède, Nate. À ces dizaines d’interrogations qui lui nuisent. « What is going on, Effie ? » Il ne l’accuse de rien, mais il envisage tout – et surtout le pire. « This isn’t you. » This isn’t me. Ses phalanges se resserrent nerveusement sur le volant et les lampadaires projettent des ombres inquiétantes sur son visage. « I’m far from perfect. I’m just trying to figure this out. » Un murmure pour conclure. Il tente de leur sauver la mise et pourtant, une part plus sombre de sa personne lui intime de laisser faire. De laisser couler. D’accepter de sauter dans le vide et de prendre la distance maintenant que c’est encore possible, avant que cela ne devienne trop difficile.

I hate that we're sleepless now
I hate we don't talk things out
Hate that there's a thousand miles from my side to your side
w/ @Nate Russo

Le silence retombe instantanément et Effie se rappelle d'un temps où elle était accueillie dans ce même habitacle là plus tendrement. Elle se sent soudainement pire qu'avant, avec cette impression ridicule d'être punie comme une adolescente sauf qu'elle a désormais trente ans et toujours la même boule au ventre. Elle pourrait se sentir humilié en plus de ça mais elle est la seule à blâmer. Au-delà de faire partie de ces gens qui ne tiennent clairement pas l'alcool elle n'est définitivement pas fière de la personne qu'elle devient sous son influence. Elle en a honte et ne comprend vraiment pas pourquoi la plupart du temps, les gens choisissent ce vice-là pour faire face aux difficultés devant soi. Pour elle cela ne fonctionne pas, à vrai dire, elle se sent même pire. Elle sent une vague de larme lui monter aux yeux et détourne le regard sur le voisinage qu'ils traversent de sa fenêtre passager. Serait-ce si terrible que ça, de tout avouer ? D'arrêter de jouer à ce petit jeu d'espion infiltré alors qu'il n'y a rien à gagner ? Sa mère aurait compris, pas vrai ? C'est ce qu'elle aimerait entendre pour se rassurer. La vérité c'est que Celia Clarke aurait tout fait pour protéger sa société sans que cela n'impacte sa vie privée. Après tout, Effie en est la preuve vivante, elle a toujours été épargnée jusqu'ici.
This isn't you. Non, ce qu'ils la poussent à être plutôt. Ce qui est nécessaire mais tout ce qu'elle ne sait pas faire. Elle a toujours eu une carapace suffisante pour la carrière de mannequin mais ça ? C'est un tout autre métier et oui, elle aurait dû s'en douter. Oui, elle aurait peut être dû refuser mais l'alternative sonne faux. You can't hand them over everything she built Effie. Everything she's done! It was for you- Dad that's not true. She loved it! She did it for her and that's amazing, what she achieved it's.. remarkable. So are you Effie! I.. I'm not her dad. Elle sait ce qu'il a pensé à ce moment-là, elle le sait parce qu'elle le voit, à chaque fois qu'il pose son regard sur elle. You look just like her. Une double peine. Il ne risque pas de l'oublier, même s'il le voulait. Cela fait déjà cinq ans et il a toujours du mal à avancer. Elle est rappelée à la réalité par le silence qui s'étire et sa question en suspens. « I.. » Par où commencer ? Quelle excuse peut-elle bien trouvé ? « I just had one of those days you know.. » Ni un mensonge, ni la franchise qu'il attendait. « I'm under a lot of pressure lately that's all. » Elle ose le regarder un instant et son profil suffit à lui serrer le cœur. Elle est de nouveau rongée par la culpabilité. Ils se sont toujours tout dit mais la relation de Nate et son père a toujours été un sujet sensible. Ce qu'elle conçoit. Oh, ça, elle sait. Elle-même se passerait volontiers de lui parler si elle en avait la possibilité. « They put me in a difficult position and… I hate it. » Elle a l'impression d'en dire trop mais c'est plus fort qu'elle. Lui mentir n'a jamais rien eu de naturel, encore moins d'aisé. C'est d'ailleurs pour cette raison qu'elle préfère être un peu plus distante, quand elle y arrive.. « I'm sorry. » Je suis désolée d'avoir gâché ta soirée, de ce qui est train de se passer dans ton dos, pour ce qui risque d'arriver, même si elle n'en pas la moindre idée.

Hold on to love tightly, honey
It may never come back
Baby, you were so right for me
Don't you ever ask that
w/ @Effie Clarke

Nate est de ceux qui pensent qu’une discussion peut tout résoudre – ou presque. Il préfère les mots aux silences, même quand ils sont difficiles, et même pénibles. Il aime se dire que toute solution peut-être trouvée aussi simplement que ça, en manipulant les bonnes syllabes, en répondant aux questions, en formulant les excuses. Mais voilà un mois que les mots n’ont plus leur place entre eux. Les phrases sont superficielles et bancales, les conversations ont perdu en profondeur et il n’est même plus sûr de savoir ce que les regards qu’ils échangent signifient. What if this was the end, uh ? Il ne cesse d’y penser et pourtant, il ne peut pas s’y résoudre. Une partie de lui, un peu égoïste, se dit que c’est l’occasion. Le bon moment pour la laisser partir, avant de lui donner une bonne raison de le détester. Puis, il y a cette autre partie, celle qui veut se battre pour ce qu’il reste d’eux. Celle qui pense que tout ceci n’est qu’une mauvaise passe et qu’une fois de plus, oui, une conversation suffira à résoudre tous les maux. Mais si ce n’était pas le cas ? Pas cette fois ?
Il y a le bruit du moteur et la musique à la radio qui tourne sur un volume presque minimal. Ce n’est pas assez pour le distraire, encore moins pour oublier tout ce qui vient de se passer. Il a mal au coeur, Nate ; pas parce qu’il est malade, non, mais pour tout ce qu’ils s’infligent. Les mots d’Effie résonnent dans l’habitacle et ses excuses semblent ridicules. Nate se crispe un peu plus derrière le volant, et c’est son regard qui brille, à la lueur des lampadaires et des feux de signalisation. « I bet you are. » Qu’il se contente de répondre. La pression est une vieille amie, pour l’un comme pour l’autre. Tant de responsabilités et d’attentes, de la part du reste du monde. Ils ont pourtant toujours réussi à s’en tirer, plus ou moins bien. Ils étaient là l’un pour l’autre, et n’était-ce pas tout ce qui importait ? Il l’écoute, à nouveau, et tente de s’accrocher à ses mots. Mais c’est si difficile, désormais, et lui n’y parvient pas, à être désolé. Il ne peut pas balayer tout ça d’un simple revers de main. Juste conduire, et rentrer, et espérer que demain, tout ira mieux. Ce ne sera pas le cas, non. « See, we used to talk things out. You used to tell me about work, about the challenges you were facing, your doubts... » Et il en a toujours fait autant. Autour d’une pizza maison, ou même en tête à tête au fond de la baignoire. Il hausse légèrement les épaules, alors qu’un soupir fatigué lui échappe. « I don’t know what’s going on, Effie. And for the first time, I feel… Well, lost ? » Ce n’est pas tant une interrogation, non. C’est plus une évidence qui a eu bien trop de mal à déborder de ses lèvres.
Ils y sont finalement, au pied du bâtiment. La porte du garage s’ouvre paresseusement et Nate rejoint l’emplacement dédié. Le moteur est coupé et à nouveau, le silence est dérangeant. Il ne sort pas tout de suite de la voiture, pourtant, et pour la première fois depuis qu’il l’a récupérée, il croise enfin son regard. « Maybe. Maybe you need space ? Time ? I don’t know... » La confusion dilate ses pupilles, et la douleur aussi. Elle est là, juste à ses côtés et pourtant, elle ne lui a jamais semblé si lointaine qu’en cet instant précis.

Cause this is torturous
Electricity between both of us
And this is dangerous
'Cause I want you so much
w/ @Nate Russo

Ses premiers mots sont cinglants et Effie comprend très vite qu'il est déjà trop tard. Quoi qu'elle ajoute par la suite ils sont bien trop embourbés dans le marécage pour espérer survivre à la surface. Surtout sur des fondations aussi bancales. Oui, ils se sont toujours tout dit. Oui, c'est presque ridicule comme c'était facile. Des soucis pros aux autres maux. Ils n'ont jamais eu de secrets l'un pour l'autre et c'est sans doute pour cette raison que c'est si dur de compartimenter les différents dangers. It used to feel so right and now it's all wrong.. L'aiguille de la boussole ne cesse de tourner sans retrouver le Nord. Ils ne sont plus que l'ombre de ce qu'ils étaient, deux êtres désaxés. Elle n'a jamais eu aussi peur de trébucher. La chute est terrible et se relever semble impossible. Il suffirait de quelques mots, d'un peu de sincérité et un retour à la transparence d'autrefois. Il suffirait d'assumer les conséquences en espérant que celles-ci soient moindre. Tout ça, dans une chronologie plus contrôlée. Ils ont raté leur fenêtre et pour un pilote c'est presque un comble.
Effie a de nouveau envie de pleurer mais aussi, de crier et supplier. Tant de besoins, tant d'émotions. Elle est d'abord submergée et il faut quelques secondes pour oser articuler quoi que ce soit. « Maybe.. » Le son qui sort de sa bouche rentre en confrontation avec ses instincts et sa main droite vient essayer une larme qu'elle sent seulement à mi chemin de sa joue. « Maybe this is what you want and it's easier to say it's what I need. » Alors que non. Elle n'a pas besoin d'être plus seule, de plus de temps ou encore de quelqu'un d'autre. Since the day they met, she never wanted anyone else. From the moment he smiled and looked through her, truly, she never felt the same. She never needed anything else than this. Us. Not perfect but true. Elle déglutit à la conclusion. Perdu. Il se sent perdu et elle n'a pas d'argument, pas de solutions miracles à apporter.
Ils sont arrivés à destination et ce lieu n'a jamais autant ressemblé à une prison où les condamnées ne souhaitent pas terminer. Elle agrippe la poignée intérieure dans l'idée d'ouvrir la portière et se sacrifier en premier puis se ravise mi chemin. « You used to tell me everything too. » Les mots tombent comme un dernier appel. « I'm sorry you felt like you couldn't anymore. » La gorge se serre, le coeur avec. Ils n'ont jamais été parfaits mais ils n'ont jamais pu se reprocher une telle chose et c'est sans doute ce qui fait le plus mal. C'est de sa faute. Elle s'est engouffrer dans cette histoire et ne sait plus comment en sortir. C'est elle qui a creusé le fossé, elle ne peut pas lui en vouloir d'avoir pris cette direction. Une choses est sûre, cette discussion aura au moins eu le mérite de faire redescendre les effets de l'alcool de son système. Pas qu'elle voit plus clairement tant sa vision est brouillée par les larmes. Elle n'a plus la force de continuer cette conversation, elle en a tout juste pour rentrer et disparaître sous les draps froids qu'ils ne partageront pas cette-fois.

And if the sky falls from heaven above
Oh, I know I had the best time falling into love
We've been living on a fault line
And for a while, you were all mine
w/ @Effie Clarke

Maybe. C’est sans doute l’un des mots les plus tristes qui soient, car il évoque la possibilité. Celle qu’on ne prend pas la peine de saisir. Une réalité alternative, dans laquelle tout ceci ne serait plus qu’un mauvais souvenir. Un monde dans laquelle il l’aurait portée jusqu’à chez eux, il l’aurait aidée à se déshabiller, ils en auraient rigolé car elle aurait trébuché dans ses bras. Ils auraient échangé un baiser, et peut-être deux, dans la salle de bain et elle l’aurait traîné tout habillé dans la douche. Ils auraient ri de la situation et ils seraient restés éveillés une bonne partie de la nuit encore, pour parler de tout et de rien, au creux du lit. Maybe. It’s a sad word, you know. Just like « almost ». Parce qu’ils ont presque réussi à s’en sortir. Presque réussi à s’aimer assez fort pour dépasser tout ça. C’est horrible, comme son ventre se tord à cette simple pensée. Ça l’est plus encore quand elle décide de partager les torts, et d’émettre l’hypothèse qu’il transpose ses propres doutes à travers les actions d’Effie. Il fronce les sourcils, Nate, dépassé par sa propre peine et une certaine forme de confusion. « Are you serious right now ? » Qu’il questionne, comme dépassé par les propos de la jeune femme. Elle a peut-être un peu raison, mais ça fait encore trop mal de l’admettre. Il secoue la tête et se laisse retomber contre le dossier du siège.
Sa gorge se serre et peut-être que ses côtes aussi, comme un étau sur des poumons qui bataillent déjà trop. Are we really doing this right now ? C’est presque irréel, totalement inconcevable. Dans aucune version de sa vie, il ne se voit raturer ce chapitre comme étant leur dernier. Pourtant, le monde est glacé et les mots sont sans appel. Ce sont des adieux qui débordent des lippes de la rousse, aussi déguisés soient-ils. Il est partagé, Russo. Complètement déboussolé par tout ce qui est en train de se passer, tiraillé par une bataille qui fait rage à l’intérieur. Lutter ou la laisser partir. Souffrir ou choisir la facilité. L’abandonner aujourd’hui ou dans quelques mois, quelle différence, n’est-ce pas ? Il se sent soudainement à l’étroit dans cette voiture et de trop dans ce monde. Le silence s’immisce entre eux à nouveau mais quand il trouve les mots justes, elle a déjà claqué la portière de la voiture, prête à rejoindre ce jardin d’Eden qui a pris des allures de no man’s land, désormais. Nate sort à la hâte de la voiture, et s’il aimerait rester d’un calme olympien, ce n’est pas le cas. Ses bras bougent à nouveau, et sa voix est plus forte – ou bien est-ce seulement le parking qui la fait résonner. « You can’t say this, Effie ! This isn’t right ! This isn’t fair. » La colère plutôt que la peine. Le choix est maladroit et peu judicieux, mais les conséquences ne pourront pas être pires, il s’en doute. « You’re the one drifting away and acting weird. What’s up with you, uh ? » Il ne s’y prend peut-être pas bien – sûrement pas, même. Mais il se raccroche comme il peut à ce qu’il leur reste, Nate. « I keep overthinking this. What am I doing wrong ? Is she having an affair ? Maybe she’s just tired of me leaving so often... » Ses épaules retombent et sa voix s’épuise. Il ferme brièvement les yeux, Nate. Juste assez pour rassembler ses idées et retrouver un semblant de cohérence. « This isn’t me leaving you. This is me trying to do the right thing for the both of us. And if you don’t want my help, if you don’t feel like talking then yes, I’d rather let you figure this out on your own and come back when you’re ready. Whatever it is. » Et quoi qu’il en coûte. Les mots sont fluides mais la décision n’est pas simple pour autant. Il le sait, ce sera quitte ou double. Prendre le risque de tout perdre, pour tenter de les sauver.

Can you see me? I'm waiting for the right time
I can't read you, but if you want, the pleasure's all mine
Can you see me using everything to hold back?
w/ @Nate Russo

Juste ?! Pourquoi est-ce qu'il continue d'utiliser ce terme-là ? Rien n'est juste, pas même eux envers l'un et l'autre. Elle a sa part de responsabilités certes, mais lui aussi. À commencer par la nuit où elle s'est réveillée avec son côté du lit vide. Elle l'a cherché, s'est levée en direction du salon en pensant le trouver mais comme par hasard, quand elle aborde le sujet avec lui, il esquive. De quoi cela s'agissait-il ? Pourquoi n'en a-t-il pas parlé, si quelque chose le tracassait au point de devoir prendre la route seule à cette heure là ? Pensait-il qu'elle ne le remarquerait pas ? Qu'il pouvait quitter les draps et s'y re-glisser aussi facilement que ça ? Elle a toujours eu le sommeil plutôt léger. Du moins, quand il n'est pas là, c'est toujours le cas. Elle n'a jamais aussi bien dormi qu'avec lui. Sa respiration a toujours eu quelque chose de rassurant, d'apaisant. Les nuits seules sont si différentes et même si elle y est habituée aussi, elle n'est jamais totalement sereine ces nuits-là. Ou alors, pensait-il qu'elle ne comprendrait pas ? Après tout, n'est-ce pas tout ce qu'il lui reproche ? Tout garder pour soi et trahir ce qu'ils avaient de si précieux pendant toutes ces années ? Une complicité. Un sentiment d'appartenir..
Voilà tout ce qu'elle met en péril pour un but qui lui échappe tout aussi facilement que ces quelques mots : « I'm not! I never wanted to get stuck in the middle of a powerplay shitsthow! » Elle ravale un semblant de sanglot en prenant conscience de l'enchaînement de ceux-ci. Ils sont à la fois bourrés et dénués de sens. Mais de tout ce qu'il a pu dire, cette partie est sans doute la plus ridicule. « Now an affair? Really Nate?! » Elle lève les bras au ciel comme il le fait si bien. Une influence qu'elle remarque souvent, dans des gestes et habitudes qu'elle n'avait pas, pas avant lui. Et immédiatement son cerveau pense à la suite, l'après. L'après lui. Un monde qu'elle n'a aucunement envie de voir se matérialiser sous ses yeux. Une réalité qu'elle a beaucoup trop de mal à imaginer et pourtant, ils n'ont jamais été aussi près du précipite. Ils n'ont même jamais été sur cette falaise là. Pas comme ça, pas aussi loin l'un de l'autre sans savoir lequel des deux sautera le premier. C'est soudainement si triste. « Do you even hear yourself? » How could I? Why would I? « So what, you don't trust me anymore? Is this what's up with you? » Pourtant c'est l'hypocrisie qui la touche le plus. Elle ne peut nier que son esprit ne s'est pas égaré là-bas aussi.. surtout quand lui-même n'a jamais été aussi distant avant. Et si là-dessus, il n'a aucun souci à se faire de son côté, elle a clairement été trompeuse sur d'autres points et elle ne sait même plus pourquoi elle continue à s'enfoncer dans ce bourbier. Il pourrait comprendre, pas vrai? Qu'elle n'a pas eu le choix? Qu'elle n'a d'abord pas pu lui dire et puis, qu'elle n'a plus su comment, tellement la culpabilité l'a attaqué ? You're not the only one overthinking this and yet, while we could have shared our thoughts, we decided otherwise. Doesn't that say a lot about us? About the degree of wrong in this? « And if it isn't you leaving me then why does it hurts so much?! » Effie a toujours détesté pleuré, ou plutôt, la facilité que les larmes ont de couler. Surtout quand elle est fatiguée. Quand elle a le sentiment que son monde s'écroule et qu'elle est incapable de retenir ce qu'elle a de plus précieux. « I can't.. » Elle ne veut ni le voir partir ni continuer à lui mentir, pourtant, elle en est persuadée, l’un ou l’autre, il faut choisir. Si elle ne veut pas risquer le pire ; qu’il finisse par la haïr..

I know I'll be alright
But I'm not tonight
I'll be lying awake counting all the mistakes I've made
Replaying fights
w/ @Effie Clarke

Les mots sont désespérés, et ils s’y accrochent dans un dernier élan, comme on cherche à se rattraper aux branches dans une interminable chute. Le problème, c’est que dans la confusion, les excuses virent en accusations et chaque phrase est plus périlleuse que la précédente. Ses propres verbes sonnent comme des reproches, et la défense d’Effie est tout aussi maladroite. Ils se rejettent les torts à défaut de les partager, puis, les voix résonnent presque trop fort au milieu de ce parking. Les murs grisâtres emprisonnent les échos, pour donner une dimension encore plus tragique à leur échange. Il reste parfaitement campé sur ses deux pieds, Nate, mais à l’intérieur, tout vacille. Son coeur s’emballe plus que de raison et ses prunelles sont étrangement humides. C’est la faiblesse qui glisse sur ses traits ; celle que seul un amour sincère provoque, alors même qu’ils sont sur le point de tout perdre. « Oh come on Euphemia ! » La voix comme un râle, alors que son visage se tord dans la confusion. L’infidélité n’était peut-être pas le sujet le plus important à amener sur la table, mais à ce stade, que peut-il croire ? Il y a trop de non-dits, trop de ratés pour fermer complètement les yeux sur cette possibilité. « Yes ! Yes, I hear what I’m saying ! And you know damn well this isn’t about me trusting you. » Ses mains s’agitent et son âme tout autant. Une violence qu’il contient à l’intérieur, dans les replis de son esprit, dans la chair, la moindre fibre musculaire. Dans la démonstration, il tape du bout des doigts sur ses tempes, tentant d’imager au mieux tout ce qui le déchire en ce moment même. « I’m just trying to figure this out. » And it feels like I’m doing all the work. Il a tant pensé, et peut-être même trop. Tout envisagé, même le pire. Et quelque part, il se dit qu’il ne pourrait même pas lui en vouloir d’avoir trouvé de l’attention ailleurs. Il n’est pas un modèle de présence et sa propre définition de l’amour est émaillée par le comportement de son propre père. Il s’est toujours dit qu’il finirait seul et au final, ce ne serait peut-être pas plus mal.
Malgré tout, il ne peut pas être indifférent aux larmes qui inondent les joues d’Effie. Elles lui transpercent l’âme avec une rare violence, mais même ça, ça ne suffit pas à lui faire reprendre pleinement contact avec la réalité. Il aimerait se précipiter vers elle et la serrer dans ses bras. Encercler sa silhouette et se perdre dans les effluves de son parfum. Il aimerait que dire pardon soit si simple et que demain soit un autre jour, à ses côtés. Mais les ratures sont trop nombreuses et les disputes, beaucoup trop récurrentes. Il aimerait pouvoir le faire, ce pas en avant, et tout oublier, encore. Passer à autre chose, jusqu’à la prochaine tempête. But not this time. Son âme s’apaise tout juste, peut-être parce que sa décision est prise. Il passe nerveusement une main dans ses propres cheveux et son regard se perd dans le vide. « Yeah, I know that. But we can’t do this anymore. It’s a never ending circle and… We deserve better. » Mieux que ces messes basses et ces secrets qui gangrènent tout. Le nœud se serre un peu plus encore dans sa gorge et il peine à tenir droit, Russo. « I know we’ll work this out, Effie. » Une voix si douce, presque un murmure, pour contraster avec tout ce qu’ils se sont dits jusque là. Où bien est-ce l’émotion qui a raison de son assurance ? « Just not tonight. » Il baisse finalement les yeux sur le sol crasseux du parking et se réfugie dans les tâches d’huile qui y dessinent de drôles d’arabesques. Puis, sans plus de cérémonie, il pivote sur ses talons et il s’éloigne vers la maserati. La gravité le rattrape et les larmes tombent enfin, maintenant que plus personne ne peut en témoigner. I know we’ll be alright. Just not tonight.